Histoires grotesques et sérieuses. Edgar Allan Poe

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Histoires grotesques et sérieuses - Edgar Allan Poe


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placés dans ce fourré dans le but de détourner l'attention du véritable théâtre du crime. Et d'abord, permettez-moi de vous faire remarquer la date de cette découverte. Rapprochez-la de la date du cinquième de mes extraits, dans la revue des journaux que j'ai faite moi-même. Vous verrez que la découverte a suivi, presque immédiatement, les communications urgentes envoyées au journal du soir. Ces communications, quoique variées, et provenant en apparence de sources diverses, tendaient toutes au même but, – lequel était d'attirer l'attention sur une bande de malfaiteurs comme auteurs de l'attentat, et sur les alentours de la barrière du Roule comme théâtre du fait. Or, ce qui peut nous étonner, ce n'est pas, naturellement, que les objets aient été trouvés par les petits garçons, à la suite de ces communications et après que l'attention publique a été dirigée de ce côté; mais on pourrait légitimement supposer que, si les enfants n'ont pas trouvé les objets plus tôt, c'est parce que lesdits objets n'étaient pas encore dans le fourré; parce qu'ils y ont été déposés à une époque tardive, – celle de la date, ou une de très-peu antérieure à la date de ces communications, – par les coupables eux-mêmes, auteurs de ces communications.

      «Ce bosquet était un singulier bosquet, – excessivement singulier. Il était d'une rare épaisseur. Dans l'enceinte de ses murailles naturelles, il y avait trois pierres extraordinaires, formant un siège avec dossier et tabouret. Et ce bosquet, où la nature imitait si bien l'art, était dans l'extrême voisinage, à quelques verges, de l'habitation de madame Deluc, de qui les enfants avaient coutume de fouiller soigneusement les fourrés pour récolter de l'écorce de sassafras. Serait-il téméraire de parier – mille contre un – qu'il ne s'écoulait pas une journée sans qu'un, au moins, de ces petits garçons vînt se cacher dans cette salle de verdure et trôner sur ce trône naturel? Ceux qui hésiteraient à parier, ou n'ont jamais été enfants, ou ont oublié la nature enfantine. Je le répète, il est excessivement difficile de comprendre comment les objets auraient pu, sans être découverts, rester dans ce bosquet plus d'un ou deux jours; et il y a ainsi de bonnes raisons de soupçonner, en dépit de la dogmatique ignorance du Soleil, qu'ils ont été déposés, à une date relativement tardive, là ou on les a trouvés.

      «Mais, pour croire que la chose s'est passée ainsi, il y a encore d'autres raisons, plus fortes qu'aucune de celles que je vous ai présentées. Laissez-moi maintenant attirer votre attention sur l'arrangement remarquablement artificiel des objets. Sur la pierre supérieure se trouvait un jupon blanc; sur la seconde, une écharpe de soie; éparpillés alentour, une ombrelle, des gants et un mouchoir de poche marqué du nom de Marie. C'est justement là un arrangement tel qu'a dû naturellement l'imaginer un esprit peu subtil, visant à trouver un arrangement naturel. Mais ce n'est pas du tout un arrangement réellement naturel. J'aurais mieux aimé voir les choses gisant toutes à terre, et foulées sous les pieds. Dans l'étroite enceinte de ce bosquet, il eût été presque impossible que le jupon et l'écharpe gardassent leur position sur les pierres, exposés aux secousses résultant d'une lutte entre plusieurs personnes. «Il y avait, – dit-on, – trace d'une lutte; la terre était piétinée; les buissons enfoncés; – mais le jupon et l'écharpe sont trouvés reposant comme sur des planches. «Les fragments de vêtements accrochés aux buissons étaient larges de trois pouces environ, et longs de six. L'un était un morceau de l'ourlet de la robe, qui avait été raccommodé … Ils ressemblaient à des bandes arrachées…» Ici, sans s'en apercevoir, le Soleil a employé une phrase excessivement suspecte. Les fragments, tels qu'il nous les décrit, ressemblent à des bandes arrachées, mais à dessein et par la main. C'est un accident des plus rares, qu'un morceau d'un vêtement tel que celui en question puisse être arraché entièrement par l'action d'une épine. Par la nature même du tissu, une épine ou un clou qui s'y accroche le déchire rectangulairement, – le divise par deux fentes longitudinales, faisant angle droit, et se rencontrant au sommet par où l'épine est entrée; – mais il est presque impossible de comprendre que le morceau soit complètement arraché. Je n'ai jamais vu cela, ni vous non plus. Pour arracher un morceau d'un tissu, il faut, dans presque tous les cas, deux forces distinctes, agissant en sens différents. Si l'étoffe présente deux bords, – si, par exemple, c'est un mouchoir, si l'on désire en arracher une bande, alors, – et seulement alors, une force unique suffira. Mais, dans le cas actuel, il est question d'une robe, qui ne présente qu'un seul côté. Quant à arracher un morceau du milieu, lequel n'offre aucun côté, ce serait miracle que plusieurs épines le pussent faire, et une seule ne le pourrait. Mais, même quand le tissu présente un côté, il faudra deux épines, agissant, l'une dans deux directions distinctes, et l'autre dans une seule. Et encore faut-il supposer que le bord n'est pas ourlé. S'il est ourlé, la chose devient presque impossible. Nous avons vu quels grands et nombreux obstacles empêchent que des morceaux soient arrachés par la simple action des épines; cependant on nous invite à croire que non-seulement un morceau, mais plusieurs morceaux ont été arrachés de cette manière! Et l'un de ces morceaux était l'ourlet de la robe! Un autre morceau était une partie de la jupe, mais non pas l'ourlet, – c'est-à-dire qu'il avait été complètement arraché, par l'action des épines, du milieu et non du bord de la jupe! Voilà, dis-je, des choses auxquelles il est bien pardonnable de ne pas croire; cependant, prises collectivement, elles forment un motif moins plausible de suspicion que cette unique circonstance si surprenante, à savoir que les objets aient pu être laissés dans ce bosquet par des meurtriers qui avaient eu la précaution d'emporter le cadavre. Toutefois, vous n'avez pas saisi exactement ma pensée, si vous croyez que mon dessein soit de nier que ce bosquet ait été le théâtre de l'attentat. Qu'il soit arrivé là quelque chose de grave, c'est possible; plus vraisemblablement un malheur, chez madame Deluc. Mais, en somme, c'est un point d'importance secondaire. Nous avons promis de tâcher de découvrir, non pas le lieu, mais les auteurs du meurtre. Tous les arguments que j'ai allégués, malgré toute la minutie que j'y ai mise, n'avaient pour but que de vous prouver, d'abord, la sottise des assertions si positives et si impétueuses du Soleil, ensuite et principalement, de vous amener, par la route la plus naturelle, à une autre idée de doute, – à examiner si cet assassinat a été ou n'a pas été l'œuvre d'une bande.

      «J'attaquerai cette question par une simple allusion aux détails révoltants donnés par le chirurgien interrogé dans l'enquête. Il me suffira de dire que ses conclusions publiées, relativement au nombre des prétendus goujats, ont été justement ridiculisées, comme fausses et complètement dénuées de base, par tous les anatomistes honorables de Paris. Je ne dis pas que la chose n'ait pas pu, matériellement, arriver comme il le dit; mais je ne vois pas de raisons suffisantes pour sa conclusion; – n'y en avait-il pas beaucoup pour une autre?

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      Lors de la publication originale de Marie Roget, les notes placées au bas des pages auraient été considérées comme superflues. Mais plusieurs années se sont écoulées depuis le drame sur lequel ce conte est basé, et il nous a paru bon de les ajouter ici, avec quelques mots d'explication relativement au dessein général. Une jeune fille,


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