LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан

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LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан


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quelque chose.

      « La joue droite… pensa M. Lenormand, la cicatrice de la joue droite… il veut s’assurer que c’est bien Pierre Leduc. »

      L’homme s’était un peu tourné, de sorte qu’on n’apercevait que les épaules. Mais les vêtements, le pardessus étaient si proches qu’ils frôlaient les rideaux derrière lesquels se cachait M. Lenormand.

      « Un mouvement de sa part, pensa-t-il, un frisson d’inquiétude, et je l’empoigne. »

      Mais l’homme ne bougea pas, tout entier à son examen. Enfin, après avoir passé son poignard dans la main qui tenait la lanterne, il releva le drap de lit, à peine d’abord, puis un peu plus, puis davantage, de sorte qu’il advint que le bras gauche du dormeur fut découvert et que la main fut à nu.

      Le jet de la lanterne éclaira cette main. Quatre doigts s’étalaient. Le cinquième était coupé à la seconde phalange.

      Une deuxième fois, Pierre Leduc fit un mouvement. Aussitôt la lumière s’éteignit, et durant un instant l’homme resta auprès du lit, immobile, tout droit. Allait-il se décider à frapper ? M. Lenormand eut l’angoisse du crime qu’il pouvait empêcher si aisément, mais qu’il ne voulait prévenir cependant qu’à la seconde suprême.

      Un long, un très long silence. Subitement, il eut la vision, inexacte d’ailleurs, d’un bras qui se levait. Instinctivement il bougea, tendant la main au-dessus du dormeur. Dans son geste il heurta l’homme.

      Un cri sourd. L’individu frappa dans le vide, se défendit au hasard, puis s’enfuit vers la fenêtre. Mais M. Lenormand avait bondi sur lui, et lui encerclait les épaules de ses deux bras.

      Tout de suite, il le sentit qui cédait, et qui, plus faible, impuissant, se dérobait à la lutte et cherchait à glisser entre ses bras. De toutes ses forces il le plaqua contre lui, le ploya en deux et retendit à la renverse sur le parquet.

      – Ah ! Je te tiens… je te tiens, murmura-t-il, triomphant.

      Et il éprouvait une singulière ivresse à emprisonner de son étreinte irrésistible ce criminel effrayant, ce monstre innommable. Il se sentait vivre et frémir, rageur et désespéré, leurs deux existences mêlées, leurs souffles confondus.

      – Qui es-tu ? dit-il… qui es-tu ?… il faudra bien parler…

      Et il serrait le corps de l’ennemi avec une énergie croissante, car il avait l’impression que ce corps diminuait entre ses bras, qu’il s’évanouissait. Il serra davantage… et davantage…

      Et, soudain, il frissonna des pieds à la tête. Il avait senti, il sentait une toute petite piqûre à la gorge… Exaspéré, il serra encore plus : la douleur augmenta. Et il se rendit compte que l’homme avait réussi à tordre son bras, à glisser sa main jusqu’à sa poitrine et à dresser son poignard. Le bras, certes, était immobilisé, mais à mesure que M. Lenormand resserrait le nœud de l’étreinte, la pointe du poignard entrait dans la chair offerte.

      Il renversa un peu la tête pour échapper à cette pointe : la pointe suivit le mouvement et la plaie s’élargit.

      Alors il ne bougea plus, assailli par le souvenir des trois crimes, et par tout ce que représentait d’effarant, d’atroce et de fatidique cette même petite aiguille d’acier qui trouait sa peau, et qui s’enfonçait, elle aussi, implacablement…

      D’un coup, il lâcha prise et bondit en arrière. Puis, tout de suite, il voulut reprendre l’offensive. Trop tard.

      L’homme enjambait la fenêtre et sautait.

      – Attention, Gourel ! cria-t-il, sachant que Gourel était là, prêt à recevoir le fugitif.

      Il se pencha.

      Un froissement de galets… une ombre entre deux arbres… le claquement de la barrière… Et pas d’autre bruit… Aucune intervention…

      Sans se soucier de Pierre Leduc, il appela :

      – Gourel !… Doudeville !

      Aucune réponse. Le grand silence nocturne de la campagne.

      Malgré lui il songea encore au triple assassinat, au stylet d’acier. Mais non, c’était impossible, l’homme n’avait pas eu le temps de frapper, il n’en avait même pas eu besoin, ayant trouvé le chemin libre.

      À son tour il sauta et, faisant jouer le ressort de sa lanterne, il reconnut Gourel qui gisait sur le sol.

      – Crebleu ! jura-t-il… S’il est mort, on me le paiera cher. Mais Gourel vivait, étourdi seulement, et, quelques minutes plus tard, revenant à lui, il grognait :

      – Un coup de poing, chef un simple coup de poing en pleine poitrine. Mais quel gaillard !

      – Ils étaient deux alors ?

      – Oui, un petit, qui est monté, et puis un autre qui m’a surpris pendant que je veillais.

      – Et les Doudeville ?

      – Pas vus.

      On retrouva l’un d’eux, Jacques, près de la barrière, tout sanglant, la mâchoire démolie, l’autre un peu plus loin, suffoquant, la poitrine défoncée.

      – Quoi ? Qu’y a-t-il ? demanda M. Lenormand.

      Jacques raconta que son frère et lui s’étaient heurtés à un individu qui les avait mis hors de combat avant qu’ils n’eussent le temps de se défendre.

      – Il était seul ?

      – Non, quand il est repassé près de nous, il était accompagné d’un camarade, plus petit que lui.

      – As-tu reconnu celui qui t’a frappé ?

      – À la carrure, ça m’a semblé l’Anglais du Palace-Hôtel, celui qui a quitté l’hôtel et dont nous avons perdu la trace.

      – Le major ?

      – Oui, le major Parbury.

      – 3 –

      Après un instant de réflexion, M. Lenormand prononça :

      – Le doute n’est plus permis. Ils étaient deux dans l’affaire Kesselbach : l’homme au poignard, qui a tué, et son complice, le major.

      – C’est l’avis du prince Sernine, murmura Jacques Doudeville.

      – Et ce soir, continua le chef de la Sûreté, ce sont eux encore… les deux mêmes.

      Et il ajouta :

      – Tant mieux. On a cent fois plus de chances de prendre deux coupables qu’un seul.

      M. Lenormand soigna ses hommes, les fit mettre au lit, et chercha si les assaillants n’avaient point perdu quelque objet ou laissé quelque trace. Il ne trouva rien, et se coucha.

      Au matin, Gourel et les Doudeville ne se ressentant pas trop de leurs blessures, il ordonna aux deux frères de battre les environs, et il partit avec Gourel pour Paris, afin d’expédier ses affaires et de donner ses ordres.

      Il déjeuna dans son bureau. À deux heures, il apprit une bonne nouvelle. Un de ses meilleurs agents, Dieuzy, avait cueilli, à la descente d’un train venant de Marseille, l’Allemand Steinweg, le correspondant de Rudolf Kesselbach.

      – Dieuzy est là ? dit-il.

      – Oui, chef, répondit Gourel, il est là avec l’Allemand.

      – Qu’on me les amène.

      À ce moment il reçut un coup de téléphone. C’était Jean Doudeville qui le demandait, du bureau de Garches. La communication fut rapide.

      – C’est toi, Jean ? Du nouveau ?

      – Oui, chef,


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