Pierre et Jean. Guy de Maupassant

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Pierre et Jean - Guy de Maupassant


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      —Est-il nécessaire d'être amoureux pour dire qu'on ne veut pas encore se marier?

      —Ah! bon, le «encore» corrige tout; tu attends.

      —Admets que j'attends, si tu veux.

      Mais le père Roland, qui avait écouté et réfléchi, trouva tout à coup la solution la plus vraisemblable.

      —Parbleu! nous sommes bien bêtes de nous creuser la tête. Maître Lecanu est notre ami, il sait que Pierre cherche un cabinet de médecin, et Jean un cabinet d'avocat, il a trouvé à caser l'un de vous deux.

      C'était tellement simple et probable que tout le monde en fut d'accord.

      —C'est servi, dit la bonne.

      Et chacun gagna sa chambre afin de se laver les mains avant de se mettre à table.

      Dix minutes plus tard, ils dînaient dans la petite salle à manger, au rez-de-chaussée.

      On ne parla guère tout d'abord; mais, au bout de quelques instants, Roland s'étonna de nouveau de cette visite du notaire.

      —En somme, pourquoi n'a-t-il pas écrit, pourquoi a-t-il envoyé trois fois son clerc, pourquoi vient-il lui-même?

      Pierre trouvait cela naturel.

      —Il faut sans doute une réponse immédiate; et il a peut-être à nous communiquer des clauses confidentielles qu'on n'aime pas beaucoup écrire.

      Mais ils demeuraient préoccupés et un peu ennuyés tous les quatre d'avoir invité cette étrangère qui gênerait leur discussion et les résolutions à prendre.

      Ils venaient de remonter au salon quand le notaire fut annoncé.

      Roland s'élança.

      —Bonjour, cher maître.

      Il donnait comme titre à M. Lecanu le «maître» qui précède le nom de tous les notaires.

      Mme Rosémilly se leva:

      —Je m'en vais, je suis très fatiguée.

      On tenta faiblement de la retenir; mais elle n'y consentit point et elle s'en alla sans qu'un des trois hommes la reconduisît, comme on le faisait toujours.

      Mme Roland s'empressa près du nouveau venu:

      —Une tasse de café, Monsieur?

      —Non, merci, je sors de table.

      —Une tasse de thé, alors?

      —Je ne dis pas non, mais un peu plus tard, nous allons d'abord parler affaires.

      Dans le profond silence qui suivit ces mots on n'entendit plus que le mouvement rythmé de la pendule et, à l'étage au-dessous, le bruit des casseroles lavées par la bonne trop bête même pour écouter aux portes.

      Le notaire reprit:

      —Avez-vous connu à Paris un certain M. Maréchal, Léon Maréchal?

      M. et Mme Roland poussèrent la même exclamation: Je crois bien!

      —C'était un de vos amis?

      Roland déclara:

      —Le meilleur, Monsieur, mais un Parisien enragé; il ne quitte pas le boulevard. Il est chef de bureau aux finances. Je ne l'ai plus revu depuis mon départ de la capitale. Et puis nous avons cessé de nous écrire. Vous savez, quand on vit loin l'un de l'autre....

      Le notaire reprit gravement:

      —M. Maréchal est décédé!

      L'homme et la femme eurent ensemble ce petit mouvement de surprise triste, feint ou vrai, mais toujours prompt, dont on accueille ces nouvelles.

      M. Lecanu continua:

      —Mon confrère de Paris vient de me communiquer la principale disposition de son testament par laquelle il institue votre fils Jean, M. Jean Roland, son légataire universel.

      L'étonnement fut si grand qu'on ne trouvait pas un mot à dire.

      Mme Roland, la première, dominant son émotion, balbutia:

      —Mon Dieu, ce pauvre Léon ... notre pauvre ami ... mon Dieu ... mon Dieu ... mort!...

      Des larmes apparurent dans ses yeux, ces larmes silencieuses des femmes, gouttes de chagrin venues de l'âme qui coulent sur les joues et semblent si douloureuses, étant si claires.

      Mais Roland songeait moins à la tristesse de cette perte qu'à l'espérance annoncée. Il n'osait cependant interroger tout de suite sur les clauses de ce testament, et sur le chiffre de la fortune; et il demanda, pour arriver à la question intéressante:

      —De quoi est-il mort, ce pauvre Maréchal?

      M. Lecanu l'ignorait parfaitement.

      —Je sais seulement, disait-il, que, décédé sans héritiers directs, il laisse toute sa fortune, une vingtaine de mille francs de rentes en obligations trois pour cent, à votre second fils, qu'il a vu naître, grandir, et qu'il juge digne de ce legs. A défaut d'acceptation de la part de M. Jean, l'héritage irait aux enfants abandonnés.

      Le père Roland déjà ne pouvait plus dissimuler sa joie et il s'écria:

      —Sacristi! voilà une bonne pensée du coeur. Moi, si je n'avais pas eu de descendant, je ne l'aurais certainement point oublié non plus, ce brave ami!

      Le notaire souriait:

      —J'ai été bien aise, dit-il, de vous annoncer moi-même la chose. Ça fait toujours plaisir d'apporter aux gens une bonne nouvelle.

      Il n'avait point du tout songé que cette bonne nouvelle était la mort d'un ami, du meilleur ami du père Roland, qui venait lui-même d'oublier subitement cette intimité annoncée tout à l'heure avec conviction.

      Seuls, Mme Roland et ses fils gardaient une physionomie triste. Elle pleurait toujours un peu, essuyant ses yeux avec son mouchoir qu'elle appuyait ensuite sur sa bouche pour comprimer de gros soupirs.

      Le docteur murmura:

      —C'était un brave homme, bien affectueux. Il nous invitait souvent à dîner, mon frère et moi.

      Jean, les yeux grands ouverts et brillants, prenait d'un geste familier sa belle barbe blonde dans sa main droite, et l'y faisait glisser, jusqu'aux derniers poils, comme pour l'allonger et l'amincir.

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