Jane Austen: Oeuvres Majeures. Джейн Остин

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Jane Austen: Oeuvres Majeures - Джейн Остин


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en effet ? c’est ce qu’il fut impossible de découvrir. Mais elle continua d’être de très-bonne humeur ; heureuse de penser que Willoughby était à la chasse, plus heureuse encore d’espérer qu’il arriverait bientôt.

      La matinée se passa en course chez des marchands, ou à laisser des cartes chez les connaissances de madame Jennings pour les informer de son retour en ville. Maria qui n’avait plus la crainte de manquer Willoughby en sortant, ou l’espoir de le rencontrer dehors, alla où l’on voulut et fut assez bonne enfant. Mais sa principale occupation était d’observer la direction du vent et les variations de l’atmosphère. Ne trouvez-vous pas qu’il fait beaucoup plus froid qu’hier, Elinor, lui disait-elle ? cela augmente sensiblement ; je suis sûre qu’il gêlera cette nuit, et… Elle se taisait ; mais Elinor achevait intérieurement sa phrase, et les chasseurs rentreront en ville. Elle était en même temps amusée et peinée de cette vivacité de sentiment qui faisait passer tour-à-tour sa sœur du désespoir à la joie, et rapporter tout à l’unique objet dont elle était occupée.

      Quelques jours se passèrent sans gelée et sans Willoughby ; et Maria les trouva longs et ennuyeux. Ni elle ni Elinor ne pouvaient cependant se plaindre en aucune manière de leur genre de vie chez madame Jennings ; il était tout autre qu’Elinor ne l’avait imaginé. La maison située dans le beau quartier de Berkeley-Street était montée sur un grand ton d’élégance et d’aisance. À l’exception de quelques vieilles connaissances de la cité, dont lady Middleton n’avait pu obtenir l’expulsion, toute la société de madame Jennings était très-distinguée. Elle présenta ses jeunes amies de manière à leur attirer mille politesses. La figure très-remarquable de Maria, les grâces d’Elinor, leur gagnèrent bientôt l’admiration et l’amitié de tous ceux à qui madame Jennings les présentait. Mais dans les premiers temps de leur séjour à Londres leurs plaisirs se bornèrent à quelques rassemblemens peu nombreux, soit chez madame Jennings, soit ailleurs, où Elinor faisait tous les soirs un grave wisk, tandis que Maria s’ennuyait à la mort, en comptant les jours et les heures, en soupirant après les frimats qui devaient lui ramener son ami.

      Le colonel Brandon ayant reçu une invitation de madame Jennings pour tous les jours, n’en laissait point passer sans venir prendre le thé avec ces dames, lorsqu’elles restaient à la maison. Il regardait Maria ; il parlait à Elinor, qui le trouvait chaque jour plus aimable et plus intéressant, et qui voyait avec un vrai chagrin que son amour pour Maria, loin de diminuer le moins du monde, augmentait visiblement. Il lui parlait peu ; mais ses regards ne l’abandonnaient pas ; il suivait tous les mouvemens de cette figure si belle, si expressive, paraissait au ciel lorsqu’elle lui adressait la parole, et tombait dans une sombre mélancolie, quand elle ne lui parlait pas.

      Environ une semaine après leur arrivée en ville, en rentrant un matin après une promenade en voiture, elles trouvèrent une carte sur la table avec le nom de Willoughby. Maria la saisit avec une émotion qui fit craindre à sa sœur qu’elle ne se trouvât mal ; Bon Dieu, s’écria-t-elle, quel bonheur, il est enfin à Londres ! Mais quel chagrin qu’il soit venu pendant notre absence ! et que je suis fâchée que nous soyons sorties ce matin ! Des larmes remplirent ses beaux yeux. Elinor très-touchée, lui dit, qu’il reviendrait sûrement le lendemain. J’en suis sûre à présent, dit Maria en pressant contre son cœur la précieuse carte. Madame Jennings entra ; elle s’échappa en emportant avec elle la carte et le nom qui lui annonçait un bonheur si passionnément désiré. Elinor fut contente et de la joie de Maria et de pouvoir enfin étudier Willoughby. Mais Maria reprit toutes ses agitations à un plus haut degré ; elle n’eut plus un instant de tranquillité. L’attente de voir d’un instant à l’autre entrer cet être adoré, la rendait incapable de tout. Elle ne parlait ni n’écoutait plus, et dès le lendemain, elle refusa positivement, sur un léger prétexte, d’accompagner madame Jennings et sa sœur à la promenade accoutumée du matin. Elinor n’insista pas et n’osa refuser à madame Jennings d’aller avec elle ; mais malgré tous ses efforts elle fut presque d’aussi mauvaise compagnie que l’aurait été sa sœur. Elle ne pouvait détourner ses pensées de la visite de Willoughby, dont elle n’avait aucun doute ; elle voyait, elle sentait l’émotion de Maria, et regrettait de n’être pas avec elle pour la soutenir, et pour juger avec plus de calme les dispositions de Willoughby.

      À son retour qu’elle pressa autant qu’il lui fut possible, elle vit au premier regard qu’elle jeta sur sa sœur, que Willoughby n’était pas venu. Maria était l’image parlante d’un abattement tout près du désespoir. Elinor la regardait avec la plus tendre compassion, lorsque le laquais entra en tenant un billet. Maria courut au devant de lui, l’arracha de ses mains, en disant vivement : Pour moi ! est-ce qu’on attend ?

      — Non, madame, c’est pour ma maîtresse. Elle avait déjà lu l’adresse et jeté le billet avec dépit surla table. — Pour Madame Jennings, et rien pour moi ! c’est désespérant en vérité, c’est pour en mourir.

      — Vous attendiez donc une lettre ? dit Elinor, incapable de garder plus long-temps le silence. Maria ne répondit rien ; ses yeux étaient pleins de larmes.

      — Vous n’avez aucune confiance en moi, chère Maria, continua Elinor après une courte pause.

      — Ce reproche est singulier de votre part, Elinor, vous qui n’avez de confiance en personne.

      — Moi ! répondit Elinor avec quelque embarras, je n’ai rien à confier.

      — Ni moi, sans doute, répondit Maria avec énergie ; nos situations sont donc tout-à-fait semblables. Nous n’avons rien à nous dire l’une à l’autre, vous parce que vous cachez tout, moi parce que je ne cache rien. Mais quand vous me donnerez l’exemple d’une confiance plus particulière, alors je le suivrai. Elinor se tut en étouffant un soupir ; qu’aurait-elle pu dire ? Le secret qui oppressait son cœur n’était pas le sien ; elle ne pouvait le trahir ; et pourquoi parler d’un homme qu’elle voulait oublier, d’un sentiment dont elle voulait triompher. Mais elle sentit qu’elle ne pouvait pas dans de telles circonstances exiger la confiance de Maria.

      Madame Jennings entra, ouvrit son billet et le lut tout haut. Il était de sa fille lady Marie Middleton qui lui annonçait leur arrivée à Londres le soir précédent, et la priait ainsi que ses belles cousines de venir passer la soirée chez elle. Les occupations de sir Georges, et de son côté un peu de rhume, les empêchaient de venir à Berkeley-Street. L’invitation fut acceptée ; mais quand l’heure d’y aller arriva, Elinor eut beaucoup de peine à persuader à Maria qu’elle ne pouvait honnêtement s’en dispenser. Willoughby n’avait point paru, n’avait point écrit ; et le tourment d’une attente continuelle et toujours trompée, avait tellement irrité les nerfs de cette pauvre jeune fille, qu’elle assurait, sans en dire la cause, n’être pas en état de sortir. Mais un motif plus fort de rester au logis, était la crainte de manquer encore la visite tant désirée. Madame Jennings vint de nouveau au secours d’Elinor par ses sages réflexions. — Il faut bien que vous veniez, Maria, lui dit-elle, car je parie que sir Georges, aura rassemblé tous les amis de Barton-Park. Maria rougit et courut chercher son schall.

      Elles furent reçues à Conduit-Street, comme elles l’étaient au Parc, avec l’élégante cérémonie et la froide politesse de lady Middleton, et avec la bruyante cordialité et la bonne humeur de sir Georges. Soyez les bien-venues, mes belles voisines, dit-il en leur serrant la main, j’ai invité pour ce soir une douzaine de couples de jeunes gens. J’aurai deux violons, et nous nous amuserons. Ce n’était pas trop l’avis de ma femme ; mais le mien a prévalu, et je pense que vous serez de mon parti. J’ai bien couru ce matin pour arranger cela. À Londres, c’est plus difficile qu’à Barton ; il y a plus de monde, mais aussi plus de plaisirs.

      En effet lady Middleton, quoiqu’elle aimât la danse, aimais mieux encore une belle représentation ; elle trouvait qu’à la campagne un bal impromptu pouvait passer ; mais à Londres elle craignait de compromettre sa réputation d’élégance, lorsque l’on saurait que l’on avait dansé chez lady Middleton avec deux violons seulement et une simple collation.

      M. et madame Palmer étaient de la partie. Mesdemoiselles Dashwood


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