Le Souvenir Zéro. Джек Марс
Читать онлайн книгу.était là. Soudain, Zéro eut l’impression d’avoir des poids lestés dans ses chaussures. Il n’avait pas envie de descendre. Il ne voulait pas affronter ça.
“Et tu dois être Greg…” dit Maria.
Greg ? C’est qui ce Greg ? Soudain, il trouva la volonté d’avancer. Il descendit une marche à la fois et elle apparût lentement. Ils s’étaient vus il y a quelques mois à peine, pourtant il eut le souffle coupé en la voyant.
Maya avait dix-huit ans à présent. Ce n’était plus une enfant et ça se voyait bien plus qu’il ne voulait l’admettre. Lorsqu’ils s’étaient retrouvés pour déjeuner l’été précédent, ses cheveux étaient encore longs et remontés en chignon, comme le règlement de l’armée le réclamait, mais elle les avait fait raccourcir depuis, arborant une coupe courte à l’arrière et sur les côtés, avec de grandes mèches qui balayaient son front en accentuant son visage fin qui devenait ainsi plus mature et anguleux. Elle avait l’air plus forte et les muscles de ses bras s’étaient développés, petits mais compacts.
Elle lui ressemblait de plus en plus, alors qu’il avait de moins en moins l’impression d’être lui-même à chaque jour qui passait.
Maya leva les yeux vers lui, alors qu’il atteignait le bas des marches. “Salut.” C’était un salut passif, ni enjoué, ni dédaigneux. Neutre. Comme quelqu’un salue un étranger.
“Salut, Maya.” Il allait la serrer dans ses bras, mais il lut une pointe d’appréhension sur son visage. Il l’étreignit à moitié, un bras autour de ses épaules en lui tapotant le dos. “Tu as… tu as l’air en forme.”
“C’est le cas.” Elle se râcla la gorge et aborda le sujet gênant. “Je te présente Greg.”
Le garçon, si on pouvait l’appeler ainsi, s’avança et tendit la main avec enthousiasme. “Monsieur Lawson, c’est un plaisir de vous rencontrer.” Il était grand, un mètre quatre-vingt-trois, avec de courts cheveux blonds, une dentition parfaite et des bras bronzés qui testaient les limites des manches de son polo.
On aurait dit le quarterback du lycée.
“Euh, enchanté, Greg.” Zéro serra la main du gamin. Greg avait une forte poigne, plus ferme que nécessaire.
Zéro le détesta immédiatement. “Tu es un, euh, un ami d’école de Maya ?”
“Petit ami,” dit Maya sans flancher.
Ce type ? Zéro l’aimait encore moins à présent. Son sourire, ses dents… Il se retrouva consumé par la jalousie. Cet idiot souriant était proche de sa fille. Plus proche que Zéro n’était autorisé à l’être.
“Pourquoi est-ce qu’on reste plantés là ? Venez, suivez-moi.” Maria referma la porte et les conduisit au salon. “Asseyez-vous. Le dîner n’est pas encore tout à fait prêt. Je vous sers quelque chose à boire ?”
Ils répondirent, mais Zéro ne les entendit même pas. Il était bien trop occupé à examiner cette personne relativement inconnue dans sa maison… et il ne parlait pas de Greg. Maya était en train de devenir une jeune femme, avec sa nouvelle coupe et ses vêtements impeccables, son petit ami, son école et ses objectifs de carrière… et il n’était pas inclus là-dedans. Dans rien de tout ça.
Malgré tout ce qui s’était passé, Maya n’avait pas dévié de l’objectif qu’elle s’était fixé presque deux ans plus tôt. Elle voulait être agent de la CIA. Plus que ça, elle voulait devenir la plus jeune agente de toute l’histoire de la CIA. Mais ça n’avait rien à voir avec le fait de suivre les traces de son père. Elle avait vécu des expériences traumatisantes, en particulier le fait d’avoir été kidnappée et remise à un réseau de trafiquants d’êtres humains. Voilà pourquoi elle voulait faire partie des protecteurs qui se battaient pour empêcher que ça n’arrive à d’autres jeunes femmes.
Une fois achevée sa dernière année de lycée, Maya avait postulé à l’académie militaire de West Point dans le dos de Zéro. Même si son bulletin était excellent, elle n’avait aucune expérience du corps d’entraînement des officiers réservistes, ni aucun plan de service militaire, donc elle ne représentait pas la candidate idéale. Mais elle avait une fois de plus prévu son coup.
Avec une ruse sacrément fourbe qui laissait présager d’une illustre carrière dans les opérations sous couverture, Maya était passée outre son père pour s’adresser à son collègue agent (et ami) Todd Strickland. Par son intermédiaire, et sous le prétexte d’être la fille de l’Agent Zéro, elle avait réussi à obtenir une lettre de recommandation du président de l’époque, Eli Pierson, qui avait pensé accorder ainsi une faveur personnelle à Zéro. Elle avait été acceptée à West Point et avait déménagé à New York avant la fin de ce premier été qui avait suivi la découverte de la vérité à propos de sa mère.
Zéro avait découvert tout ça alors qu’elle faisait ses valises. Il était déjà trop tard pour l’arrêter, même si ce n’était pas faute d’avoir essayé. Mais aucune supplique ne l’avait dissuadée.
Elle était à présent en deuxième année et, même si les liens entre le père et la fille étaient presque coupés, Maria prenait des nouvelles de Maya aussi régulièrement que possible et tenait Zéro au courant. Il savait qu’elle était la meilleure de sa classe, excellant dans tout ce qu’elle entreprenait et faisant la fierté de son université. Il savait qu’elle se dirigeait vers une grande carrière.
Il espérait juste que son chemin de carrière soit plus heureux que le sien qui avait conduit au meurtre de sa mère et ruiné ses relations avec son père.
“Alors.” Greg se râcla la gorge, assis à côté de Maya sur le canapé, tandis que Zéro était face à eux dans un fauteuil. “Maya m’a dit que vous êtes comptable ?”
Zéro esquissa un léger sourire. Bien sûr, Maya avait choisi un travail particulièrement fade pour sa couverture. “En effet,” dit-il. “En finance d’entreprise.”
“C’est… intéressant.” Greg s’efforça de sourire en retour.
Quel flagorneur. Qu’est-ce qu’elle lui trouve à ce type ? “Et toi, Greg ?” demanda-t-il. “Qu’est-ce que tu comptes faire ensuite ? Devenir officier ?”
“Non, non, je ne crois pas que ce soit fait pour moi.” Le gamin secoua la main comme s’il rejetait cette idée. “Je prévois de rejoindre la NCAVC. À l’UAC exactement…” Il s’interrompit et émit un petit rire. “Désolé, Monsieur Lawson, j’avais oublié que je parlais à un civil. Je veux devenir agent du FBI de l’Unité d’Analyses Comportementales à la Division des Crimes Violents. Vous savez, les types qui traquent les tueurs en série, les terroristes nationaux, etc.”
“Ça a l’air cool,” répondit platement Zéro. Bien sûr qu’il savait ce qu’était la NCAVC et l’UAC, tout comme n’importe quelle personne qui allume la télévision en prime time, mais il ne s’en vanta pas. En fait, il était presque sûr que si ce sale gosse en face de lui savait qu’il était l’Agent Zéro, il ravalerait son sourire mielleux pour se transformer en admirateur à ses pieds en moins de cinq secondes.
Mais il ne pouvait rien dire de tout ça. Aussi, il ajouta, “Ça semble ambitieux également.”
“Greg peut le faire,” claironna Maya. “C’est le premier des deuxièmes classes.”
“Ça veut dire ‘junior,’” expliqua Greg à Zéro. “Mais nous ne l’appelons pas ainsi à West Point. Et Maya est la meilleure des troisièmes classes.” Il tendit la main et serra doucement le genou de Maya.
Zéro dut se retenir physiquement de grimacer de dégoût. Soudain, il comprit pourquoi Maya était venue avec ce garçon. Il jouait plus qu’un simple rôle de tampon entre eux. Puisqu’il était ici, ils ne pouvaient pas parler ouvertement. Il n’y aurait pas de discussion sur la CIA ou sur le passé. Bon sang, il n’était même pas sûr de pouvoir lui demander ce qu’il