Les aventures complètes d'Arsène Lupin. Морис Леблан

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Les aventures complètes d'Arsène Lupin - Морис Леблан


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de la vérité allait apparaître. Et le silence avait une gravité extrême.

      Enfin, le comte apparut dans l’embrasure de la porte. Il était pâle et singulièrement agité. Il dit à ses amis, d’une voix tremblante :

      – Je vous demande pardon… les révélations de monsieur sont si imprévues… je n’aurais jamais pensé…

      Sa femme l’interrogea avidement :

      – Parle… je t’en supplie… qu’y a-t-il ?

      Il balbutia :

      – La fente existe… à l’endroit même indiqué… le long du carreau…

      Il saisit brusquement le bras du chevalier et lui dit d’un ton impérieux :

      – Et maintenant, monsieur, poursuivez… je reconnais que vous avez raison jusqu’ici ; mais maintenant, ce n’est pas fini… répondez… que s’est-il passé, selon vous ?

      Floriani se dégagea doucement et après un instant prononça :

      – Eh bien, selon moi, voilà ce qui s’est passé. L’individu, sachant que Mme de Dreux allait au bal avec le collier, a jeté sa passerelle pendant votre absence. Au travers de la fenêtre, il vous a surveillé et vous a vu cacher le bijou. Dès que vous êtes parti, il a coupé la vitre et a tiré l’anneau.

      – Soit, mais la distance est trop grande pour qu’il ait pu, par le vasistas, atteindre la poignée de la fenêtre.

      – S’il n’a pu l’ouvrir, c’est qu’il est entré par le vasistas lui-même.

      – Impossible ; il n’y a pas d’homme assez mince pour s’introduire par là.

      – Alors ce n’est pas un homme.

      – Comment !

      – Certes. Si le passage est trop étroit pour un homme, il faut bien que ce soit un enfant.

      – Un enfant !

      – Ne m’avez-vous pas dit que votre amie Henriette avait un fils ?

      – En effet… un fils qui s’appelait Raoul.

      – Il est infiniment probable que c’est ce Raoul qui a commis le vol.

      – Quelle preuve en avez-vous ?

      – Quelle preuve ?… il n’en manque pas, de preuves… Ainsi, par exemple…

      Il se tut et réfléchit quelques secondes. Puis il reprit :

      – Ainsi, par exemple, cette passerelle, il n’est pas à croire que l’enfant l’ait apportée du dehors et remportée sans que l’on s’en soit aperçu. Il a dû employer ce qui était à sa disposition. Dans le réduit où Henriette faisait sa cuisine, il y avait, n’est-ce pas, des tablettes accrochées au mur où l’on posait les casseroles ?

      – Deux tablettes, autant que je me souvienne.

      – Il faudrait s’assurer si ces planches sont réellement fixées aux tasseaux de bois qui les supportent. Dans le cas contraire, nous serions autorisés à penser que l’enfant les a déclouées, puis attachées l’une à l’autre. Peut-être aussi, puisqu’il y avait un fourneau, trouverait-on le crochet à fourneau dont il a dû se servir pour ouvrir le vasistas.

      Sans mot dire le comte sortit, et cette fois, les assistants ne ressentirent même point la petite anxiété de l’inconnu qu’ils avaient éprouvée la première fois. Ils savaient, ils savaient de façon absolue que les prévisions de Floriani étaient justes. Il émanait de cet homme une impression de certitude si rigoureuse qu’on l’écoutait non point comme s’il déduisait des faits les uns des autres, mais comme s’il racontait des événements dont il était facile de vérifier au fur et à mesure l’authenticité.

      Et personne ne s’étonna lorsque à son tour le comte déclara :

      – C’est bien l’enfant, c’est bien lui, tout l’atteste.

      – Vous avez vu les planches… le crochet ?

      – J’ai vu… les planches ont été déclouées… le crochet est encore là.

      Mme de Dreux-Soubise s’écria :

      – C’est lui… Vous voulez dire plutôt que c’est sa mère. Henriette est la seule coupable. Elle aura obligé son fils…

      – Non, affirma le chevalier, la mère n’y est pour rien.

      – Allons donc ! Ils habitaient la même chambre, l’enfant n’aurait pu agir à l’insu d’Henriette.

      – Ils habitaient la même chambre, mais tout s’est passé dans la pièce voisine, la nuit, tandis que la mère dormait.

      Et le collier ? fit le comte, on l’aurait trouvé dans les affaires de l’enfant.

      – Pardon ! Il sortait, lui. Le matin même où vous l’avez surpris devant sa table de travail, il venait de l’école, et peut-être la justice, au lieu d’épuiser ses ressources contre la mère innocente, aurait-elle été mieux inspirée en perquisitionnant là-bas, dans le pupitre de l’enfant, parmi ses livres de classe.

      – Soit, mais ces deux mille francs qu’Henriette recevait chaque année, n’est-ce pas le meilleur signe de sa complicité ?

      – Complice, vous eût-elle remerciés de cet argent ? Et puis, ne la surveillait-on pas ? Tandis que l’enfant est libre, lui, il a toute facilité pour courir jusqu’à la ville voisine pour s’aboucher avec un revendeur quelconque et lui céder à vil prix un diamant, deux diamants, selon le cas… sous la seule condition que l’envoi d’argent sera effectué de Paris, moyennant quoi on recommencera l’année suivante.

      Un malaise indéfinissable oppressait les Dreux-Soubise et leurs invités. Vraiment il y avait dans le ton, dans l’attitude de Floriani, autre chose que cette certitude qui, dès le début avait si fort agacé le comte. Il y avait comme de l’ironie, et une ironie qui semblait plutôt hostile que sympathique et amicale ainsi qu’il eût convenu.

      Le comte affecta de rire.

      – Tout cela est d’un ingénieux qui me ravit ! Mes compliments ! Quelle imagination brillante !

      – Mais non, mais non, s’écria Floriani avec plus de gravité, je n’imagine pas, j’évoque des circonstances qui furent inévitablement telles que je les montre.

      – Qu’en savez-vous ?

      – Ce que vous-même m’en avez dit. Je me représente la vie de la mère et de l’enfant, là-bas, au fond de la province, la mère qui tombe malade, les ruses et les inventions du petit pour vendre les pierreries et sauver sa mère ou tout au moins adoucir ses derniers moments. Le mal l’emporte. Elle meurt. Des années passent. L’enfant grandit, devient un homme. Et alors – et pour cette fois, je veux bien admettre que mon imagination se donne libre cours – supposons que cet homme éprouve le besoin de revenir dans les lieux où il a vécu son enfance, qu’il les revoie, qu’il retrouve ceux qui ont soupçonné, accusé sa mère… pensez-vous à l’intérêt poignant d’une telle entrevue dans la vieille maison où se sont déroulées les péripéties du drame ?

      Ses paroles retentirent quelques secondes dans le silence inquiet, et sur le visage de M. et Mme de Dreux, se lisait un effort éperdu pour comprendre, en même temps que la peur, que l’angoisse de comprendre. Le comte murmura :

      – Qui êtes-vous donc, monsieur ?

      – Moi ? Mais le chevalier Floriani que vous avez rencontré à Palerme et que vous avez été assez bon de convier chez vous déjà plusieurs fois.

      – Alors que signifie cette histoire ?

      – Oh ! Mais rien du tout ! C’est simple jeu de ma part. J’essaie de me figurer la joie que le fils d’Henriette, s’il existe encore, aurait à vous dire qu’il fut le seul coupable,


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