La vie et la mort du roi Richard III. Уильям Шекспир
Читать онлайн книгу.d'inquiétudes, je jure que jamais je n'ai aigri Sa Majesté contre le duc de Clarence, et qu'au contraire j'ai plaidé sa cause avec chaleur. Milord, vous me faites une honteuse injure de jeter sur moi, contre toute vérité, ces soupçons déshonorants.
GLOCESTER. – Vous êtes capable de nier que vous avez été la cause de l'emprisonnement de milord Hastings?
RIVERS. – Elle le peut, milord; car…
GLOCESTER. – Elle le peut, lord Rivers? et qui ne le sait pas qu'elle le peut? Elle peut vraiment faire bien plus que le nier: elle peut encore vous faire obtenir nombre d'importantes faveurs et nier après que sa main vous ait secondé, et faire honneur de toutes ces dignités à votre rare mérite. Que ne peut-elle pas? Elle peut!.. oui, par la messe 5, elle peut…
RIVERS. – Eh bien! par la messe, que peut-elle?..
GLOCESTER. – Ce qu'elle peut, par la messe! épouser un roi, un beau jeune adolescent. Nous savons que votre grand'mère n'a pas trouvé un si bon parti.
ÉLISABETH. – Milord de Glocester, j'ai trop longtemps enduré vos insultes grossières, et vos brocards amers. Par le ciel! j'informerai Sa Majesté de ces odieux outrages que j'ai tant de fois soufferts avec patience. J'aimerais mieux être servante de ferme que d'être une grande reine à cette condition d'être ainsi tourmentée, insultée, et en butte à vos emportements. Je trouve bien peu de joie à être reine d'Angleterre!
MARGUERITE. – Et ce peu, puisse-t-il être encore diminué! Mon Dieu, je te le demande! Tes honneurs, ta grandeur, et le trône où tu t'assieds, sont à moi.
GLOCESTER, à Élisabeth. – Quoi! vous me menacez de vous plaindre au roi? Allez l'instruire, et ne m'épargnez pas: comptez que ce que je vous ai dit, je le soutiendrai en présence du roi: je brave le danger d'être envoyé à la Tour. Il est temps que je parle: on a tout à fait oublié mes travaux.
MARGUERITE, toujours derrière. – Odieux démon! Je ne m'en souviens que trop. Tu as tué, dans la Tour, mon époux Henri, et mon pauvre fils Édouard à Tewksbury.
GLOCESTER, à Élisabeth. – Avant que vous fussiez reine, ou votre époux roi, j'étais le cheval de peine dans toutes ses affaires, l'exterminateur de ses fiers ennemis, le rémunérateur prodigue de ses amis; pour couronner son sang, j'ai versé le mien.
MARGUERITE. – Oui, et un sang bien meilleur que le sien ou le tien.
GLOCESTER, à Élisabeth. – Et pendant tout ce temps, vous et votre mari Grey, combattiez pour la maison de Lancastre; et vous aussi, Rivers. – Votre mari n'a-t-il pas été tué dans le parti de Marguerite, à la bataille de Saint-Albans? Laissez-moi vous remettre en mémoire, si vous l'oubliez, ce que vous étiez alors, et ce que vous êtes aujourd'hui; et en même temps ce que j'étais moi, et ce que je suis.
MARGUERITE. – Un infâme meurtrier, et tu l'es encore.
GLOCESTER. – Le pauvre Clarence abandonna son père Warwick, et se rendit parjure. Que Jésus le lui pardonne!..
MARGUERITE. – Que Dieu l'en punisse!
GLOCESTER. – Pour combattre en faveur des droits d'Édouard à la couronne, et pour son salaire, ce pauvre lord est dans les fers! Plût à Dieu que j'eusse comme Édouard un coeur de roche, ou que celui d'Édouard fût tendre et compatissant comme le mien! Je suis, pour le monde où nous vivons, d'une sensibilité vraiment trop puérile.
MARGUERITE. – Fuis donc aux enfers, de par l'honneur, et quitte ce monde, démon infernal; c'est là qu'est ton royaume.
RIVERS. – Milord de Glocester, dans ces temps difficiles, où vous nous reprochez d'avoir été les ennemis de votre maison, nous avons suivi notre maître, notre légitime souverain; nous en ferions de même pour vous si vous deveniez notre roi.
GLOCESTER. – Si je le devenais? J'aimerais mieux être porte-balle: loin de mon coeur une pareille pensée!
ÉLISABETH. – Milord, quand vous vous figurez qu'il y ait si peu de joie à être roi d'Angleterre, vous pouvez vous figurer aussi que je n'ai pas plus de joie à en être reine.
MARGUERITE. – La reine d'Angleterre goûte, en effet, très peu de joie, car c'est moi qui le suis, et je n'en ai plus aucune. – Je ne peux me contenir plus longtemps. (Elle s'avance.) Écoutez-moi, pirates querelleurs, qui vous disputez le partage des dépouilles que vous m'avez enlevées: qui de vous peut me regarder sans trembler? Si vous ne vous inclinez pas comme des sujets soumis, devant moi votre reine, c'est comme des rebelles que vous frissonnez devant moi que vous avez déposée. (A Glocester.) Ah! brigand de noble race, ne te détourne pas.
GLOCESTER. – Abominable sorcière ridée, que viens-tu offrir à ma vue?
MARGUERITE. – L'image de ce que tu as détruit; c'est là ce que je veux faire, avant de te laisser partir.
GLOCESTER. – N'as-tu pas été bannie sous peine de mort?
MARGUERITE. – Oui, je l'ai été: mais je trouve l'exil plus cruel que ne serait la mort pour être restée en ces lieux. – Tu me dois un époux et un fils! – (à la reine Élisabeth) et toi, un royaume; (à l'assemblée) et vous tous l'obéissance: mes douleurs vous appartiennent de droit, et tous les biens que vous usurpez sont à moi.
GLOCESTER. – La malédiction qu'appela sur toi mon noble père, lorsque tu ceignis son front belliqueux d'une couronne de papier, et que par tes outrages tu fis couler de ses yeux des torrents de larmes, et qu'ensuite, pour les essuyer, tu lui présentas un mouchoir trempé dans le sang innocent du charmant Rutland; ces malédictions que, dans l'amertume de son coeur, il invoqua contre toi, sont tombées sur sa tête: c'est Dieu, et non pas nous, qui a puni ton action sanguinaire.
ÉLISABETH. – Dieu montre sa justice en faisant droit à l'innocent!
HASTINGS. – Oh! ce fut l'action la plus odieuse, d'égorger cet enfant; le trait le plus impitoyable dont on ait jamais entendu parler!
RIVERS. – Les tyrans mêmes pleurèrent, quand on leur en fit le récit.
DORSET. – Il n'est personne qui n'en ait prédit la vengeance.
BUCKINGHAM. – Northumberland qui y était présent en pleura.
MARGUERITE. – Quoi! vous étiez à vous quereller et tout prêts à vous prendre à la gorge avant que j'arrivasse, et maintenant vous tournez toutes vos haines contre moi! Les malédictions d'York ont-elles donc eu tant de pouvoir sur le ciel, que la mort de Henri, la mort de mon aimable Édouard, la perte de leur couronne, et mon déplorable bannissement aient seulement servi de satisfaction pour la mort de ce méchant petit morveux? Les malédictions peuvent-elles percer les nuages et pénétrer dans les cieux? S'il en est ainsi, nuages épais, donnez passage à mes rapides imprécations. – Qu'au défaut de la guerre, votre roi périsse par la débauche, comme le nôtre a péri par le meurtre, pour le faire roi! (A la reine.) Qu'Édouard ton fils, aujourd'hui prince de Galles, pour me payer Édouard, mon fils, avant lui prince de Galles, périsse dans sa jeunesse, par une fin violente! Et toi, qui es reine, pour ma vengeance à moi qui étais reine, puisses-tu survivre à tes grandeurs, comme moi, malheureuse que je suis! Puisses-tu vivre longtemps pour pleurer longtemps la perte de tes enfants, et en voir une autre parée de tes dépouilles, comme je te vois aujourd'hui à ma place! Que tes jours de bonheur expirent longtemps avant ta mort, et après de longues heures de peine; meurs après avoir cessé d'être mère, d'être épouse, d'être reine d'Angleterre! Rivers, et toi, vous étiez présents, et tu l'étais aussi, lord Hastings, lorsque mon fils fut percé de leurs poignards sanglants. Que Dieu, je l'en conjure, ne laisse vivre aucun de vous, jusqu'au terme naturel de sa vie, mais qu'un accident imprévu tranche vos jours!
GLOCESTER. – Mégère, as-tu fini ta conjuration, vieille et détestable sorcière que tu es?
MARGUERITE. – Et je t'oublierais, toi! Arrête, chien: il faut que tu m'entendes. Si le Ciel tient en réserve quelques châtiments douloureux, plus cruels que ceux que je peux te souhaiter, oh! qu'il les
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