Le Piège Zéro. Джек Марс

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Le Piège Zéro - Джек Марс


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à lui-même. Il était loin d’en avoir fini avec le travail de terrain, même s’il n’était plus rémunéré, s’il voulait aller au bout de cette conspiration qu’il avait seulement commencé à découvrir. Il n’avait pas le choix. Étant donné qu’il savait quelque chose, il était en danger. Et ses filles aussi restaient en danger.

      L’espace d’un instant, il aurait souhaité ne rien savoir sur l’agence ou sur le moindre complot. Il aurait juste aimé être professeur d’université et père de famille.

      Mais c’est impossible. Donc, tu dois faire tout l’inverse.

      Il n’avait pas besoin de moins de souvenirs. Il avait déjà essayé cette option et elle n’avait pas si bien fonctionné que ça. Il avait donc besoin de se rappeler plus. Plus il se souviendrait de choses sur ce qu’il savait deux ans auparavant, moins de travail il aurait pour découvrir la vérité. Et peut-être qu’il n’aurait plus à s’inquiéter très longtemps.

      Debout dans la cuisine, à seulement quelques pas de l’endroit où Thompson avait été tué, Reid prit sa décision. Il allait ressortir la vieille lettre écrite par Alan Reidigger et relire le nom du neurologue suisse qui lui avait implanté le suppresseur de mémoire dans la tête.

      CHAPITRE UN

      Abdallah Ben Mohammed était mort.

      Le corps du vieil homme gisait sur une dalle en granit dans la cour de l’enceinte, un ensemble de structures carrées aux murs beiges situé à environ quatre-vingts kilomètres à l’ouest d’Albaghdadi dans le désert d’Iraq. C’est là que la Confrérie s’était établie après leur expulsion du Hamas, afin d’échapper à la vigilance des forces américaines présentes durant l’occupation et la démocratisation consécutive du pays. Pour quiconque n’étant pas membre de la Confrérie, l’ensemble n’était rien d’autre qu’une communauté de Shiites orthodoxes : les raids et les inspections forcées de la propriété n’ayant rien donné. Leurs cachettes étaient bien camouflées.

      Le vieil homme s’était assuré personnellement de leur survie, dépensant sa propre fortune pour perpétuer leur idéologie. Mais, à présent, Ben Mohammed était mort.

      Awad était debout, stoïque, à côté de la dalle supportant le corps du vieil homme, qui avait déjà viré au gris. Les quatre femmes de Ben Mohammed avaient déjà procédé au ghusl, lavant trois fois son corps avant de l’envelopper de blanc. Ses yeux étaient paisiblement fermés, mains croisées sur la poitrine, la droite par-dessus la gauche. Il n’avait pas une seule marque ou égratignure. Ces six dernières années, il avait vécu dans l’enceinte, sans jamais sortir de ses murs. Il n’avait pas été tué par un tir de mortier ou une attaque au drone comme tant d’autres moudjahidines.

      “Comment ?” demanda Awad en arabe. “Comment est-il mort ?”

      “Il a fait une attaque durant la nuit,” dit Tarek. Cet homme plus petit était debout de l’autre côté de la dalle en pierre, face à Awad. De nombreux membres de la Confrérie considéraient Tarek comme le bras droit de Ben Mohammed, mais Awad savait que ses capacités se cantonnaient à faire passer les messages et à prendre soin de la santé déclinante du vieillard. “L’attaque a entraîné un arrêt cardiaque. Ce fut instantané, il n’a pas souffert.”

      Awad posa sa main sur la poitrine immobile du vieil homme. Ben Mohammed lui avait enseigné beaucoup de choses, non seulement au niveau de la foi, mais aussi sur le monde, ses nombreux fléaux et sur ce que le fait de diriger impliquait.

      Et Awad, quant à lui, voyait devant lui non seulement un corps, mais une opportunité. Trois nuits auparavant, Allah lui avait offert un rêve, même s’il était difficile à présent de ne le considérer que comme un songe. Il était forcément prémonitoire. Dans son rêve, il avait vu Ben Mohammed mourir et entendu une voix lui dire de s’élever pour diriger la Confrérie. Il était sûr et certain que cette voix était celle du prophète, parlant au nom du Seul Véritable Dieu.

      “Hassan est parti en raid pour chercher des munitions,” dit doucement Tarek. “Il ne sait pas encore que son père est mort. Il rentre aujourd’hui. Il saura bientôt que le devoir de diriger la Confrérie lui incombe…”

      “Hassan est faible,” dit soudain Awad sur un ton plus rude qu’il ne l’aurait voulu. “Alors que la santé de Ben Mohammed déclinait, Hassan n’a rien fait pour nous empêcher de nous affaiblir petit à petit.”

      “Mais…” Tarek hésita. Il connaissait parfaitement le tempérament enflammé d’Awad. “Le devoir de diriger incombe au fils ainé…”

      “Ce n’est pas une dynastie,” contesta Awad.

      “Alors, qui… ?” Tarek s’interrompit en comprenant ce qu’Awad suggérait.

      Le jeune homme plissa les yeux, mais ne répondit pas. Il n’en avait pas besoin Son regard était une menace plus que suffisante. Awad était jeune, même pas trente ans, mais il était grand et fort, avec une mâchoire aussi rigide et intraitable que sa foi. Peu osaient même le contredire.

      “Ben Mohammed voulait que je dirige,” dit Awad à Tarek. “Il l’a dit lui-même.” Ce n’était pas totalement vrai. Le vieil homme avait dit à plusieurs reprises qu’il voyait un potentiel de grandeur chez Awad et qu’il était un leader naturel. Awad avait interprété ces paroles comme une déclaration des intentions de l’ancien.

      “Il ne m’a rien dit de tel,” s’aventura à répondre Tarek, même s’il prononça ces mots à voix basse. Il gardait les yeux rivés au sol, évitant le regard sombre d’Awad.

      “Parce qu’il savait que tu es faible, toi aussi,” rétorqua Awad. “Dis-moi, Tarek, depuis combien de temps n’es-tu pas sorti de ces murs ? Depuis combien de temps est-ce que tu vis grâce à la charité et à la sécurité apportées par Bin Mohammed, sans être concerné par les balles et les bombes ?” Awad se pencha en avant sur le corps du vieil homme en ajoutant tout bas, “Combien de temps crois-tu que tu vas survivre avec seulement tes habits sur le dos une fois que j’aurai pris le pouvoir et que je t’aurai chassé ?”

      La lèvre inférieure de Tarek bougea, mais aucun son ne s’échappa de sa bouche. Awad sourit : Tarek, ce petit homme, avait peur.

      “Continue,” le nargua Awad. “Dis ce que tu as sur le cœur.”

      “Combien de temps…” Tarek déglutit. “Combien de temps crois-tu que tu pourras rester dans ces murs sans les finances d’Hassan Ben Abdallah ? Nous serons dans la même position. Mais dans des lieux différents.”

      Awad sourit. “Oui. Tu es malin, Tarek. Mais j’ai une solution.” Il se pencha par-dessus la dalle, mais baissa d’un ton. “Confirme mes dires.”

      Tarek leva les yeux d’un coup, surpris par les mots d’Awad.

      “Dis-leur que tu as entendu la même chose que moi,” poursuivit-il. “Dis-leur qu’Abdallah Ben Mohammed m’a nommé chef juste avant de mourir et je te jure que tu auras toujours une place parmi la Confrérie. Nous récupérerons notre force. Nous ferons connaître notre nom. Et la volonté d’Allah, que la paix soit sur Lui, sera accomplie.”

      Avant même que Tarek ait pu répondre, une sentinelle cria un ordre dans la cour. Deux hommes ouvrirent les lourdes portes en fer juste à temps pour que deux camions s’y engouffrent, les rainures de leurs pneus remplies de boue à cause de la pluie récente.

      Huit hommes en sortirent, les seuls qui avaient pu s’en tirer… Mais même depuis l’endroit où il se trouvait, Awad pouvait dire que le raid avait été un fiasco. Ils n’avaient ramené aucune munition.

      Parmi les huit hommes, l’un d’entre eux s’avança, les yeux écarquillés sous le choc en voyant la dalle en pierre entre Awad et Tarek. Hassan Ben Abdallah Bin Mohammed avait trente-quatre ans, mais il avait encore l’air d’un adolescent avec ses joues creuses


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