Le Piège Zéro. Джек Марс

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Le Piège Zéro - Джек Марс


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prisonnier iranien est attaché à une table, légèrement penché. Il a une cagoule sur la tête. Tu appuies une serviette contre son visage.

      Reid frémit, alors qu’un frisson lui courait dans le dos. Il avait déjà eu ce souvenir. Dans son autre vie en tant qu’Agent de la CIA nommé Kent Steele, il s’était adonné à des “techniques d’interrogation” sur les terroristes capturés pour leur soutirer des renseignements. C’était ainsi que l’agence les appelait : des techniques. Des trucs comme noyer les gens, visser leurs pouces ou leur arracher des ongles.

      Mais il ne s’agissait pas de techniques. C’était de la torture, pure et simple. Tout comme sur Guy Fawkes dans la Tour de Londres.

      Tu ne fais plus ça à présent, se rappela-t-il. Ce n’est pas toi.

      Il se râcla de nouveau la gorge. “Pendant trois jours, il a été, euh, interrogé. Pour finir, il donna les noms des six autres et ils furent tous condamnés à mort. Le complot visant à faire exploser le Parlement et à tuer le Roi James I fut déjoué et le cinq novembre est devenu un jour où l’on célèbre cette tentative d’assassinat ratée…”

      Une cagoule sur sa tête. Une serviette contre son visage.

      De l’eau que l’on verse. Sans s’arrêter. Le prisonnier se débat tellement qu’il casse son propre bras.

      “Dis-moi la vérité !”

      “Professeur Lawson ?” C’était le jeune brun du premier rang. Il regardait fixement Reid... comme tous les autres. Est-ce que je viens de dire ça à voix haute ? Il ne pensait pas que ce soit le cas, mais le souvenir s’était frayé un chemin pour entrer dans son cerveau et, peut-être aussi, pour sortir de sa bouche. Tous les yeux étaient rivés sur lui et certains étudiants chuchotaient entre eux, alors qu’il restait planté là, comme un imbécile, en rougissant.

      Il regarda sa montre une quatrième fois en l’espace de seulement quelques minutes.

      “Euh, désolé,” dit-il en riant nerveusement. “Disons qu’on va en rester là pour aujourd’hui. Je veux que vous vous renseigniez sur Fawkes et sur les motivations derrière la Conspiration des Poudres. Lundi, nous aborderons le reste de la Réforme Protestante et commencerons la Guerre de Trente Ans.”

      La salle de classe s’emplit de voix et de bruissements, tandis que les étudiants rangeaient leurs livres dans leurs sacs et commençaient à quitter la pièce. Reid se frotta le front. Il sentit un mal de tête commencer à se former, ce qui devenait de plus en plus fréquent chez lui ces temps-ci.

      Le souvenir du captif torturé restait en suspension dans sa tête comme un épais brouillard. C’était également quelque chose qui était devenu plus fréquent ces derniers temps. Peu de nouveaux souvenirs avaient fait leur apparition récemment, mais ceux qui lui étaient déjà revenus se manifestaient à nouveau, plus forts et plus viscéraux. C’était comme une sensation de déjà vu, à la seule différence qu’il savait que c’était vrai. Ce n’était pas juste une sensation : il avait déjà fait toutes ces choses-là.

      “Professeur Lawson.” Reid leva les yeux d’un coup, tiré de ses pensées, pendant qu’une jeune femme blonde approchait de lui avec son sac en bandoulière. “Vous avez un rancart ce soir ou quoi ?”

      “Pardon ?” Reid fronça les sourcils, décontenancé par la question.

      La jeune femme esquissa un sourire. “J’ai remarqué que vous regardiez votre montre toutes les trente secondes. Je me suis dit que vous deviez avoir un rencart ce soir.”

      Reid s’efforça de sourire. “Non, rien de tel, c’est juste qu’il me tarde le week-end.”

      Elle acquiesça légèrement. “Moi aussi. Profitez bien du vôtre, Professeur.” Elle pivota pour quitter la salle de classe, puis s’arrêta, tournant la tête par-dessus son épaule pour demander, “Ça vous dirait un de ces quatre ?”

      “Quoi donc ?” demanda-t-il avec hésitation.

      “Un rencart. Avec moi.”

      Reid cligna des yeux, ne sachant quoi répondre. “Je, euh…”

      “Réfléchissez-y.” Elle esquissa un nouveau sourire, avant de tourner les talons.

      Il resta planté là un long moment, essayant de digérer la scène qui venait de se produire. Tous les souvenirs de torture ou de sites secrets qui persistaient dans sa tête avaient été balayés par cette demande inattendue. Il connaissait plutôt bien cette étudiante qu’il avait rencontrée plusieurs fois durant ses heures de permanence, afin de revoir avec elle le travail fait en cours. Elle s’appelait Karen, avait vingt-trois ans, et était l’une des plus brillantes élèves de sa classe. Elle avait fait une pause de deux ans après le lycée pour voyager, principalement en Europe, avant d’aller à l’Université.

      Il eut presque envie de se mettre des baffes en réalisant soudain qu’il en savait plus qu’il ne le devrait sur la jeune femme. Ces visites à son bureau n’étaient pas pour lui demander son aide : elle avait un faible pour son professeur. Et elle était indéniablement belle, si toutefois Reid s’autorisait à penser ainsi ne serait-ce qu’un instant, ce qui n’était généralement pas le cas, étant depuis longtemps adepte de la compartimentation physique et mentale des attributs de ses étudiants pour lui permettre de se concentrer sur leur éducation.

      Mais cette fille, Karen, était très attirante avec ses cheveux blonds et sa silhouette mince, mais athlétique, et…

      “Oh,” dit-il à haute voix dans la classe vide.

      Elle lui faisait penser à Maria.

      Cela faisait quatre semaines que Reid et ses filles étaient rentrés d’Europe de l’Est. Deux jours plus tard, Maria avait été envoyée sur une autre opération et, malgré tous ses messages et appels sur son téléphone mobile personnel, il n’avait eu aucune nouvelle d’elle depuis. Il se demandait où elle était, si elle allait bien… et si elle ressentait toujours la même chose pour lui. Leur relation était devenue tellement complexe qu’il était difficile de savoir où ils en étaient. Leur amitié, qui avait été à deux doigts de se transformer en romance, avait temporairement été gâchée par la méfiance. Puis, ils avaient fini par être des alliés coincés du mauvais côté d’un complot gouvernemental.

      Mais ce n’était pas le moment de tergiverser sur ce que Maria ressentait pour lui. Il s’était juré de s’occuper de ce complot et d’essayer d’en découvrir plus que ce qu’il savait à l’époque. Pourtant, en reprenant son activité de professeur, avec son nouveau poste à l’agence et en s’occupant de ses filles, il avait à peine le temps d’y songer.

      Reid soupira et regarda de nouveau sa montre. Récemment, il avait fait des folies et acheté une montre intelligente qui était connectée à son téléphone mobile via le Bluetooth. Même quand son téléphone était sur son bureau ou dans une autre pièce, il pouvait être alerté en cas de nouveau message ou appel. Et la regarder si fréquemment était devenu aussi instinctif que de cligner des yeux. Aussi compulsif que de gratter une démangeaison.

      Il avait envoyé un SMS à Maya avant le début du cours. Généralement, ses messages étaient des questions anodines en apparence, comme “Qu’est-ce que tu veux manger ce soir ?” ou “Est-ce que tu as besoin que je vienne te chercher quelque part en rentrant à la maison ?” Mais Maya n’était pas idiote. Elle savait qu’il les surveillait, peu importe la façon dont il tentait de présenter les choses. Surtout depuis qu’il avait tendance à envoyer un message ou à appeler toutes les heures à peu près.

      Il était assez intelligent, lui aussi, pour le reconnaître. La névrose sur la sécurité de ses filles, son attitude compulsive à tout vérifier, et l’anxiété consécutive qui en découlait à l’attente d’une réponse… même la force et l’impact des flashbacks qu’il endurait. Qu’il veuille l’admettre ou non, tous les signes désignaient un certain degré de stress post-traumatique à la suite de l’épreuve


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