Les enfants des bois. Майн Рид

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Les enfants des bois - Майн Рид


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qu'ils trouvèrent.

      Quand le gros de l'armée eut passé, le soleil reparut, mais il ne brillait plus sur des champs verts et sur un jardin en fleurs. Autour de la maison, au nord, au sud, à l'est, à l'ouest, l'œil s'arrêtait sur une scène de désolation. On n'apercevait pas un brin d'herbe, pas une feuille; les arbres eux-mêmes, dépouillés de leur écorce, semblaient avoir été flétris de la main de Dieu. Le sol n'aurait pas été plus nu ni plus aride s'il eût été balayé par un incendie. Il n'y avait plus de jardin, plus de maïs, plus de sarrasin, plus de ferme. Le kraal était au milieu d'un désert!

      Les paroles sont impuissantes à reproduire les émotions qu'éprouva en ce moment Von Bloom. Quel changement en deux heures! Il pouvait à peine en croire ses sens. Il doutait de la réalité. Il avait bien prévu que les locustes mangeraient ses légumes et ses céréales, mais son imagination n'avait pas conçu l'épouvantable dévastation qu'il avait sous les yeux. Tout le paysage s'était métamorphosé. Les arbres dont la brise venait d'agiter le feuillage avaient un aspect plus triste qu'en hiver. Le sol même semblait avoir changé de forme. Certes, si le fermier, absent pendant le passage des sauterelles, était revenu sans savoir ce qui s'était passé, il n'aurait pas reconnu l'emplacement de son habitation.

      Avec le flegme particulier à sa race, Von Bloom s'assit et demeura longtemps sans mouvement et sans voix. Les enfants se groupèrent autour de lui, le cœur gros et les larmes aux yeux. Ils ne pouvaient apprécier toute l'étendue de leur malheur, et leur père lui-même ne la comprit pas tout d'abord. Il ne songea qu'à la destruction de ses belles récoltes; et si on tient compte de sa situation isolée, cette perte irréparable suffisait pour l'accabler.

      —Tout le fruit de mes travaux est perdu! s'écria-t-il d'une voix altérée. O fortune, fortune, c'est la seconde fois que tu es cruelle pour moi!

      —Ne vous lamentez pas, mon père, lui dit une douce voix; nous sommes sains et saufs auprès de vous.

      C'était la voix de Gertrude, dont la petite main blanche se posa sur son épaule.

      Il lui sembla qu'un ange lui souriait. Il prit l'enfant entre ses bras et la pressa avec effusion contre son cœur, et ce cœur se sentit soulagé.

      —Apporte-moi le livre, dit-il à l'un de ses fils.

      On apporta la Bible; les fermoirs massifs furent rouverts, et des hymnes pieux montèrent du milieu du désert.

      Après avoir chanté un psaume, tous prièrent à genoux pendant quelques minutes. Quand Von Bloom se releva et promena les yeux autour de lui, le désert lui parut embeaumé comme la rose.

      Telle est la magique influence de la résignation et de l'humilité sur le cœur humain.

       Table des matières

      L'ÉMIGRATION

      Malgré toute sa confiance dans la protection de l'Etre suprême, Von Bloom connaissait le proverbe: Aide-toi, le Ciel t'aidera. La religion ne lui avait pas appris à s'abandonner passivement à la Providence, et il s'occupa immédiatement de prendre des mesures pour se tirer d'embarras. Sa position était non-seulement triste, mais encore périlleuse. La plaine au milieu de laquelle il se trouvait s'étendait à perte de vue, sans la moindre trace de végétation; mais au-delà de ces limites, le pays n'était pas sans doute moins dévasté. Il était certain que l'armée d'insectes dont il était victime pouvait être comptée au nombre des plus considérables, et il savait que les sauterelles ravagent parfois une superficie de plusieurs milliers de milles.

      Il était impossible de songer à rester au kraal. Les chevaux, les bœufs, les moutons ne pouvaient vivre sans nourriture; et s'ils périssaient, où la famille trouverait-elle sa subsistance? Il fallait quitter le kraal et se mettre sans retard à la recherche d'un pâturage. Déjà les animaux, retenus à l'étable plus tard que de coutume, beuglaient, hennissaient ou bêlaient pour demander leur délivrance. Ils n'allaient pas tarder à avoir faim, et il était difficile de dire comment on pourrait leur procurer des aliments.

      Il n'y avait pas de temps à perdre; les minutes elles-mêmes étaient précieuses. Von Bloom se demanda s'il monterait un de ses meilleurs chevaux et partirait seul à la recherche d'un pâturage, ou s'il ferait atteler sa charrette pour déménager immédiatement. Son hésitation ne fut pas longue. Comme dans tous les cas il était forcé de quitter tôt ou tard son domaine, il se décida à partir sans délai, avec sa famille, ses domestiques, ses dieux lares et ses bestiaux.

      —Qu'on attelle la charrette? cria-t-il à Swartboy.

      Le Bosjesman, fier de la réputation qu'il avait acquise comme cocher, s'empressa de prendre son fouet au manche de bambou, à la longue lanière de cuir, et y mit une nouvelle mèche taillée dans la peau d'une antilope.

      —Oui, baas, je vais atteler, dit-il en faisant claquer son fouet, et posant le manche contre le mur de la maison, il alla chercher les bœufs de trait.

      La charrette de Van Bloom était une de celles que tous les fermiers du Cap s'enorgueillissent de posséder; c'était une tente roulante, un véhicule de première classe que le porte-drapeau avait fait faire au temps de sa prospérité. Il s'en servait autrefois pour mener sa femme et ses enfants au nacht maal ou au wolikheids. En ses beaux jours, huit chevaux choisis traînaient rapidement l'énorme voiture. Hélas! des bœufs devaient les remplacer, car Van Bloom n'avait que cinq chevaux qu'il avait conservés comme montures. Quant à la charrette, elle était en aussi bon état que lorsqu'elle excitait l'envie de tous les boors du comté de Graaf-Reinet. Elle avait des coffres par devant, par derrière et sur les côtés, des poches intérieures et une couverture blanche comme la neige.

      La caisse avait conservé sa solidité, et les roues étaient un chef-d'œuvre de charronnage; c'était, en somme, ce qui restait de meilleur au porte-drapeau, car elle valait à elle seule tout son bétail.

      Pendant que Swartboy et Hendrik attachaient douze bœufs au timon avec des harnais de peau de buffle, le boor, aidé par ses autres enfants, chargeait sur la voiture les meubles et les ustensiles de ménage, qui étaient en trop petit nombre pour que ce fût une tâche difficile. Au bout d'une heure environ, la précieuse charrette eut reçu tous les bagages; les bœufs furent attelés, les chevaux sellés, et tout fut prêt pour le voyage.

      Mais de quel côté se diriger? Jusqu'à ce moment Von Bloom n'avait pensé qu'à franchir les frontières de la solitude désolée qui l'environnait. Il devenait nécessaire de déterminer la direction à prendre. Il importait d'éviter celle d'où étaient venues les sauterelles et celle qu'elles avaient suivie en s'éloignant. Des deux côtés on était sûr de ne pas trouver une poignée d'herbe pour les animaux affamés. En choisissant une autre route, les voyageurs avaient plus de chance de rencontrer un pâturage, mais ils n'étaient pas certains d'avoir de l'eau, dont la privation les exposait à périr avec leurs bestiaux.

      Von Bloom eut d'abord l'idée de se rendre aux établissements; mais ils étaient à l'est du kraal, et la contrée qu'il fallait traverser avait dû être ravagée par les sauterelles. D'ailleurs, dans cette direction, le cours d'eau le plus voisin était à une distance de cinquante milles, et les bestiaux périraient infailliblement avant de l'avoir atteint. Au nord s'étendait le désert de Kalihari, où l'on ne connaissait point d'oasis; et puis c'était de là qu'étaient venues les sauterelles, qui dérivaient au sud au moment où on les avait aperçues pour la première fois.

      Il ne restait plus que l'ouest, pour lequel Von Bloom se décida. A la vérité les insectes émigrants s'étaient montrés au bout de l'horizon occidental, mais ils y avaient été amenés par une saute de vent, et elle avait été trop subite pour leur laisser le temps de faire de grands ravages.

      Von Bloom savait que dans l'ouest, à une distance de quarante milles, se trouvait un bon pâturage arrosé par une source limpide. Il avait quelquefois poussé ses excursions


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