LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан

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LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан


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      Ils descendaient, ils descendaient, Isidore silencieux, Lupin toujours exubérant.

      – Je voudrais bien savoir ce que fait Ganimard ? Dégringole-t-il les autres escaliers pour me barrer l’entrée du tunnel ? Non, il n’est pas si bête… Il aura laissé là quatre hommes… et quatre hommes suffisent.

      Il s’arrêta.

      – Écoute… ils crient là-haut… c’est ça, ils auront ouvert la fenêtre et ils appellent leur flotte… Regarde, on se démène sur les barques… on échange des signaux… le torpilleur bouge… Brave torpilleur ! je te reconnais, tu viens du Havre… Canonniers, à vos postes… Bigre, voilà le commandant… Bonjour, Duguay-Trouin.

      Il passa son bras par une fenêtre et agita son mouchoir. Puis il se remit en marche.

      – La flotte ennemie fait force de rames, dit-il. L’abordage est imminent. Dieu que je m’amuse !

      Ils perçurent des bruits de voix au-dessous d’eux. À ce moment, ils approchaient du niveau de la mer, et ils débouchèrent presque aussitôt dans une vaste grotte où deux lanternes allaient et venaient parmi l’obscurité. Une ombre surgit et une femme se jeta au cou de Lupin !

      – Vite ! Vite ! J’étais inquiète !… Qu’est-ce que vous faisiez ?… Mais vous n’êtes pas seul ?…

      Lupin la rassura.

      – C’est notre ami Beautrelet… Figure-toi que notre ami Beautrelet a eu la délicatesse… mais je te raconterai cela… nous n’avons pas le temps… Charolais, tu es là ?… Ah ! bien… Le bateau ?…

      Charolais répondit « Le bateau est prêt. »

      – Allume, fit Lupin.

      Au bout d’un instant le bruit d’un moteur crépita, et Beautrelet dont le regard s’habituait peu à peu aux demi-ténèbres, finit par se rendre compte qu’ils se trouvaient sur une sorte de quai, au bord de l’eau, et que, devant eux, flottait un canot.

      – Un canot automobile, dit Lupin, complétant les observations de Beautrelet. Hein, tout ça t’épate, mon vieil Isidore… Tu ne comprends pas ?… Comme l’eau que tu vois n’est autre que l’eau de la mer qui s’infiltre à chaque marée dans cette excavation, il en résulte que j’ai là une petite rade invisible et sûre…

      Mais fermée, objecta Beautrelet. Personne ne peut y entrer, et personne en sortir.

      – Si, moi, fit Lupin, et je vais te le prouver.

      Il commença par conduire Raymonde, puis revint chercher Beautrelet. Celui-ci hésita.

      – Tu as peur ? dit Lupin.

      – De quoi ?

      – D’être coulé à fond par le torpilleur ?

      – Non.

      – Alors tu te demandes si ton devoir n’est pas de rester côté Ganimard, justice, société, morale, au lieu d’aller côté Lupin, honte, infamie, déshonneur ?

      – Précisément.

      – Par malheur, mon petit, tu n’as pas le choix… Pour l’instant, il faut qu’on nous croie morts tous les deux… et qu’on me fiche la paix que l’on doit à un futur honnête homme. Plus tard, quand je t’aurai rendu ta liberté, tu parleras à ta guise… je n’aurai plus rien à craindre.

      À la manière dont Lupin lui étreignit le bras, Beautrelet sentit que toute résistance était inutile. Et puis, pourquoi résister ? N’avait-il pas le droit de s’abandonner à la sympathie irrésistible que, malgré tout, cet homme lui inspirait ? Ce sentiment fut si net en lui qu’il eut envie de dire à Lupin :

      « Écoutez, vous courez un autre danger plus grave : Sholmès est sur vos traces… »

      – Allons, viens, lui dit Lupin, avant qu’il se fût résolu à parler.

      Il obéit et se laissa mener jusqu’au bateau, dont la forme lui parut singulière et l’aspect tout à fait imprévu.

      Une fois sur le pont, ils descendirent les degrés d’un petit escalier abrupt, d’une échelle plutôt, qui était accrochée à une trappe, laquelle trappe se referma sur eux.

      Au bas de l’échelle, il y avait, vivement éclairé par une lampe, un réduit de dimensions très exiguës où se trouvait déjà Raymonde, et où ils eurent exactement la place de s’asseoir tous les trois. Lupin décrocha un cornet acoustique et ordonna :

      – En route, Charolais.

      Isidore eut l’impression désagréable que l’on éprouve à descendre dans un ascenseur, l’impression du sol, de la terre qui se dérobe sous vous, l’impression du vide. Cette fois, c’était l’eau qui se dérobait, et du vide s’entrouvrait, lentement…

      – Hein, nous coulons ? ricana Lupin. Rassure-toi… le temps de passer de la grotte supérieure où nous sommes, à une petite grotte située tout en bas, à demi ouverte à la mer, et où l’on peut entrer à marée basse… tous les ramasseux de coquillages la connaissent… Ah ! Dix secondes d’arrêt… Nous passons… Et le passage est étroit ! Juste la grandeur du sous-marin…

      – Mais, interrogea Beautrelet, comment se fait-il que les pêcheurs qui entrent dans la grotte d’en bas ne sachent pas qu’elle est percée en haut et communique avec une autre grotte d’où part un escalier qui traverse l’Aiguille ? La vérité est à la disposition du premier venu.

      – Erreur, Beautrelet ! La voûte de la petite grotte publique est fermée, à marée basse, par un plafond mobile, couleur de roche, que la mer en montant déplace et élève avec elle, et que la mer en redescendant rapplique hermétiquement sur la petite grotte. C’est pourquoi à marée haute, je puis passer… Hein c’est ingénieux… Une idée à Bibi ça… Il est vrai que ni César, ni Louis XIV, bref qu’aucun de mes aïeux ne pouvait l’avoir puisqu’ils ne jouissaient pas du sous-marin… Ils se contentaient de l’escalier qui descendait alors jusqu’à la petite grotte du bas… Moi, j’ai supprimé les dernières marches et imaginé ce plafond mobile. Un cadeau que je fais à la France… Raymonde, ma chérie, éteignez la lampe qui est à côté de vous… nous n’en avons plus besoin… au contraire.

      En effet, une clarté pâle, qui semblait la couleur même de l’eau, les avait accueillis au sortir de la grotte et pénétrait dans la cabine par les deux hublots dont elle était munie et par une grosse calotte de verre qui dépassait le plancher du pont et permettait d’inspecter les couches supérieures de la mer.

      Et tout de suite une ombre glissa au-dessus d’eux.

      – L’attaque va se produire. La flotte ennemie cerne l’Aiguille… Mais si creuse que soit cette Aiguille, je me demande comment ils vont y pénétrer…

      Il prit le cornet acoustique :

      – Ne quittons pas les fonds, Charolais… Où allons-nous ? Mais je te l’ai dit… À Port-Lupin… et à toute vitesse, hein ? Il faut qu’il y ait de l’eau pour aborder… nous avons une dame avec nous.

      Ils rasaient la plaine de rocs. Les algues, soulevées, se dressaient comme une lourde végétation noire, et les courants profonds les faisaient onduler gracieusement, se détendre, et s’allonger comme des chevelures qui flottent. Une ombre encore, plus longue…

      – C’est le torpilleur, dit Lupin.., le canon va donner de la voix… Que va faire Duguay-Trouin ? Bombarder l’Aiguille ? Ce que nous perdons, Beautrelet, en n’assistant pas à la rencontre de Duguay-Trouin et de Ganimard ! La réunion des forces terrestres et des forces navales !… Hé, Charolais ! Nous dormons…

      On filait vite, cependant. Les champs de sable avaient succédé aux rochers, puis ils virent presque aussitôt d’autres rochers, qui marquaient la pointe droite d’Étretat, la porte d’Amont. Des poissons s’enfuyaient à leur approche. L’un


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