Micah Clarke – Tome III. La Bataille de Sedgemoor. Артур Конан Дойл

Читать онлайн книгу.

Micah Clarke – Tome III. La Bataille de Sedgemoor - Артур Конан Дойл


Скачать книгу
tenait non seulement à ce qu'on me reconnaissait quelque influence personnelle mais encore parce qu'on savait que j'avais accès facile auprès de Mylord Halifax, de Sidney Godolphin, de Lawrence Hyde, et d'autres dont la volonté suffisait pour faire ou défaire un homme.

      Remarquez-vous ces lumières sur la gauche? Ne serait-il pas à propos d'aller voir si nous ne pourrions pas y trouver quelque chose?

      – Hooker a des ordres pour se rendre à une certaine ferme, répondis-je. Nous pourrions visiter celle-ci à notre retour, si nous en avions le temps. Nous repasserons par ici avant le jour.

      – Il faut que nous ayons des vivres, dit-il, dussé-je aller à cheval jusque dans le Surrey. Je veux être pendu, si j'ose regarder en face mes mousquetaires à moins de leur rapporter quelque chose à faire rôtir au bout de leur baguette.

      Ils n'avaient rien eu de plus savoureux à se mettre sous la dent que leurs balles, au moment où je les ai quittés.

      Mais je parlais de ma vie d'autrefois à Londres.

      Notre journée était bien remplie.

      Un homme de qualité avait-il du goût pour le sport? Il y avait toujours de quoi l'intéresser.

      Il pouvait aller voir tirer à l'épée à Hockley, ou les combats de corps à Shoo-Lane, ou les combats d'animaux à Southwark, ou aller tirer à la cible de Tothill Fields.

      Ou bien encore il pouvait faire un tour aux jardins des plantes médicinales de Saint-James, ou profiter de la marée basse pour aller par la rivière jusqu'aux vergers de cerisiers de Rotherhithe, ou se rendre en voiture à Islington pour boire la crème, mais il lui fallait avant tout sa promenade dans le Parc, ce qui est le dernier mot de la mode pour un gentleman fashionable dans sa tenue.

      Vous le voyez, Clarke, nous étions des gens fort actifs, dans notre désœuvrement, et ce n'étaient pas les occupations qui nous manquaient.

      Puis, le soir venu, il y avait les théâtres pour nous attirer, les jardins de Dorset, Lincoln's Inn, Drury-Lane, le théâtre de la Reine, et entre les quatre, il s'en trouvait bien un qui procurât quelque amusement.

      – Là du moins, dis-je, votre temps était bien employé, vous ne pouviez écouter les grandes pensées et les phrases sublimes de Shakespeare, de Massinger, sans en sentir en votre âme quelque effet.

      Sir Gervas eut un rire silencieux.

      – Vous me rafraîchissez autant que cet air délicieux de la campagne, Micah, dit-il. Sachez-le donc, grand cher enfant que vous êtes. Si nous fréquentions le théâtre, ce n'était point pour voir les pièces.

      – Pourquoi donc, au nom du Ciel? demandai-je.

      – Pour nous voir les uns les autres, répondit-il. La mode exigeait, je vous l'assure, qu'un homme fashionable restât debout, tournant le dos à la scène depuis que le rideau se levait jusqu'à ce qu'il tombât.

      C'était les vendeuses d'oranges à taquiner, et je vous réponds qu'elles ont la langue bien pendue, ces donzelles.

      C'étaient les masques du parterre, dont les petits loups noirs invitaient à l'indiscrétion.

      C'étaient les beautés de la ville, les célébrités de la Cour, autant de cibles pour nos monocles.

      La pièce! Oui vraiment, pardieu, nous avions mieux à faire que d'écouter des alexandrins ou d'apprécier le mérite des hexamètres!

      Il est vrai que si la Jeune dansait, si Mistress Bracegirdle ou Mistress Oldfield paraissaient en scène, nous faisions entendre nos bourdonnements ou nos battoirs, mais ce que nous applaudissions, c'était la beauté de la femme plutôt que l'actrice.

      – Et la pièce finie, vous alliez sans doute souper, puis vous coucher.

      – Souper? Oui certes. On allait parfois à la maison du Rhin, d'autres fois chez Pontack dans Abchurch-Lane. Chacun avait ses préférences à ce point de vue.

      Puis c'étaient les dés et les cartes chez le Groom Porter, le piquet, le hasard, le primero, à votre choix.

      Ensuite vous pouviez rencontrer l'univers entier dans les cafés, où l'on servait souvent un arrière-souper aux os grillés et fortement épicés et aux prunes, pour dissiper les vapeurs du vin.

      Ah! ma foi! Micah, si les juifs voulaient bien desserrer leurs griffes, ou si cette guerre nous portait quelque chance, vous devriez venir à la ville avec moi et voir toutes ces choses-là par vous-même.

      – À parler franchement, cela ne me tente guère, répondis-je. J'ai le caractère lent et solennel, et dans les scènes de cette sorte je ferais l'effet d'une tête de mort sur la table du festin.

      Sir Gervas allait répondre quand tout à coup le silence de la nuit fut déchiré par un cri très long, perçant, qui fit frémir jusqu'aux dernières fibres de notre corps.

      Jamais je n'entendis une clameur empreinte d'une pareille angoisse.

      Nous arrêtâmes nos chevaux.

      Nos hommes en firent autant derrière nous, et nous tendîmes l'oreille pour saisir quelque indice qui nous fit connaître de quel côté venait ce bruit.

      Les uns étaient d'avis qu'il partait de notre droite et les autres que c'était de notre gauche.

      Bientôt il retentit de nouveau, violent, aigu, comme un cri d'agonie.

      C'était celui d'une femme qui expire dans la souffrance.

      – C'est par ici, Major Hooker, cria Sir Gervas se dressant sur ses étriers et sondant les ténèbres du regard. Il y a une maison au delà des deux champs. J'aperçois une faible lumière, comme celle d'une fenêtre dont les volets seraient fermés.

      – N'allons-nous pas y courir sans retard demandai-je avec impatience, car notre commandant restait impassible sur son cheval, comme s'il ne savait pas du tout quel parti prendre.

      – Je suis ici, Capitaine Clarke, dit il, pour amener des vivres à l'armée, et je n'ai en aucune manière le droit de me détourner de mon trajet pour m'occuper d'autres incidents.

      – Par la mort, mon homme! s'écria Sir Gervas. Il y a une femme en danger. Major, vous n'allez pas poursuivre votre route en la laissant appeler vainement au secours? Écoutez, c'est encore elle.

      Et comme il parlait encore, le cri de détresse partit de nouveau de la maison isolée.

      – Non, je ne peux en supporter davantage, m'écriai-je.

      Mon sang bouillonnait dans mes veines.

      – Major Hooker, allez exécuter vos ordres, mon ami et moi nous vous quitterons ici. Nous saurons justifier notre manière d'agir devant le Roi; venez, Sir Gervas.

      – Remarquez-le, c'est bel et bien de la mutinerie, Capitaine Clarke. Vous êtes sous mes ordres, et si vous me quittez, ce sera à vos risques et périls.

      – En pareille circonstance, je me soucie de tes ordres autant que d'un liard, répartis-je avec vivacité.

      Faisant faire demi-tour à Covenant, je le lançai d'un coup d'éperon dans un sentier étroit, labouré d'ornière profonde qui conduisait à la maison, suivi de Sir Gervas et de deux ou trois soldats.

      Au même instant, j'entendis Hooker donner un ordre d'un ton bref, et les roues grincer, ce qui me prouva qu'il ne comptait plus sur nous, et qu'il s'était remis en route pour accomplir sa mission.

      – Il a raison, dit le baronnet pendant que nous suivions le sentier. Saxon ou tout autre vieux soldat, le louerait de son esprit de discipline.

      – Il y a des choses qui l'emportent sur la discipline, dis-je à demi-voix. Il m'était impossible d'aller plus loin en abandonnant cette pauvre créature dans la détresse. Mais voyez, qu'est-ce que ceci?

      En face de nous se dessinait une masse sombre.

      En approchant, nous reconnûmes que c'étaient quatre chevaux attachés par la bride à la haie.

      – Des chevaux de la cavalerie, Capitaine Clarke, s'écria un


Скачать книгу