Orgueil et Préjugés (Edition bilingue: français-anglais). Джейн ОÑтин
Читать онлайн книгу.fera rien ; elle-même a deux nièces à caser. C’est une femme égoïste et hypocrite. Je n’attends rien d’elle.
– Moi non plus, dit Mr. Bennet, et je suis bien aise de penser que vous n’aurez pas besoin de ses services.
Mrs. Bennet ne daigna pas répondre ; mais, incapable de se maîtriser, elle se mit à gourmander une de ses filles :
– Kitty, pour l’amour de Dieu, ne toussez donc pas ainsi. Ayez un peu pitié de mes nerfs.
– Kitty manque d’à-propos, dit le père, elle ne choisit pas le bon moment pour tousser.
– Je ne tousse pas pour mon plaisir, répliqua Kitty avec humeur. Quand doit avoir lieu votre prochain bal, Lizzy ?
– De demain en quinze.
– Justement ! s’écria sa mère. Et Mrs. Long qui est absente ne rentre que la veille. Il lui sera donc impossible de nous présenter Mr. Bingley puisqu’elle-même n’aura pas eu le temps de faire sa connaissance.
– Eh bien, chère amie, vous aurez cet avantage sur Mrs. Long : c’est vous qui le lui présenterez.
– Impossible, Mr. Bennet, impossible, puisque je ne le connaîtrai pas. Quel plaisir trouvez-vous à me taquiner ainsi ?
– J’admire votre réserve ; évidemment, des relations qui ne datent que de quinze jours sont peu de chose, mais si nous ne prenons pas cette initiative, d’autres la prendront à notre place. Mrs. Long sera certainement touchée de notre amabilité et si vous ne voulez pas faire la présentation, c’est moi qui m’en chargerai.
Les jeunes filles regardaient leur père avec surprise. Mrs. Bennet dit seulement :
– Sottises que tout cela.
– Quel est le sens de cette énergique exclamation ? s’écria son mari, vise-t-elle les formes protocolaires de la présentation ? Si oui, je ne suis pas tout à fait de votre avis. Qu’en dites-vous, Mary ? vous qui êtes une jeune personne réfléchie, toujours plongée dans de gros livres ?
Mary aurait aimé faire une réflexion profonde, mais ne trouva rien à dire.
– Pendant que Mary rassemble ses idées, continua-t-il, retournons à Mr. Bingley.
– Je ne veux plus entendre parler de Mr. Bingley ! déclara Mrs. Bennet.
– J’en suis bien fâché ; pourquoi ne pas me l’avoir dit plus tôt ? Si je l’avais su ce matin je me serais certainement dispensé d’aller lui rendre visite. C’est très regrettable, mais maintenant que la démarche est faite, nous ne pouvons plus esquiver les relations.
La stupéfaction de ces dames à cette déclaration fut aussi complète que Mr. Bennet pouvait le souhaiter, celle de sa femme surtout, bien que, la première explosion de joie calmée, elle assurât qu’elle n’était nullement étonnée.
– Que vous êtes bon, mon cher ami ! Je savais bien que je finirais par vous persuader. Vous aimez trop vos enfants pour négliger une telle relation. Mon Dieu, que je suis contente ! Et quelle bonne plaisanterie aussi, d’avoir fait cette visite ce matin et de ne nous en avoir rien dit jusqu’à présent !
– Maintenant, Kitty, vous pouvez tousser tant que vous voudrez, déclara Mr. Bennet. Et il se retira, un peu fatigué des transports de sa femme.
– Quel excellent père vous avez, mes enfants ! poursuivit celle-ci, lorsque la porte se fut refermée. – Je ne sais comment vous pourrez jamais vous acquitter envers lui. À notre âge, je peux bien vous l’avouer, on ne trouve pas grand plaisir à faire sans cesse de nouvelles connaissances. Mais pour vous, que ne ferions-nous pas !... Lydia, ma chérie, je suis sûre que Mr. Bingley dansera avec vous au prochain bal, bien que vous soyez la plus jeune.
– Oh ! dit Lydia d’un ton décidé, je ne crains rien ; je suis la plus jeune, c’est vrai, mais c’est moi qui suis la plus grande.
Le reste de la soirée se passa en conjectures ; ces dames se demandaient quand Mr. Bingley rendrait la visite de Mr. Bennet, et quel jour on pourrait l’inviter à dîner.
English
III
Malgré toutes les questions dont Mrs. Bennet, aidée de ses filles, accabla son mari au sujet de Mr. Bingley, elle ne put obtenir de lui un portrait qui satisfît sa curiosité. Ces dames livrèrent l’assaut avec une tactique variée : questions directes, suppositions ingénieuses, lointaines conjectures. Mais Mr. Bennet se déroba aux manœuvres les plus habiles, et elles furent réduites finalement à se contenter des renseignements de seconde main fournis par leur voisine, lady Lucas.
Le rapport qu’elle leur fit était hautement favorable : sir William, son mari, avait été enchanté du nouveau voisin. Celui-ci était très jeune, fort joli garçon, et, ce qui achevait de le rendre sympathique, il se proposait d’assister au prochain bal et d’y amener tout un groupe d’amis. Que pouvait-on rêver de mieux ? Le goût de la danse mène tout droit à l’amour ; on pouvait espérer beaucoup du cœur de Mr. Bingley.
– Si je pouvais voir une de mes filles heureusement établie à Netherfield et toutes les autres aussi bien mariées, répétait Mrs. Bennet à son mari, je n’aurais plus rien à désirer.
Au bout de quelques jours, Mr. Bingley rendit sa visite à Mr. Bennet, et resta avec lui une dizaine de minutes dans la bibliothèque. Il avait espéré entrevoir les jeunes filles dont on lui avait beaucoup vanté le charme, mais il ne vit que le père. Ces dames furent plus favorisées car, d’une fenêtre de l’étage supérieur, elles eurent l’avantage de constater qu’il portait un habit bleu et montait un cheval noir.
Une invitation à dîner lui fut envoyée peu après et, déjà, Mrs. Bennet composait un menu qui ferait honneur à ses qualités de maîtresse de maison quand la réponse de Mr. Bingley vint tout suspendre : « Il était obligé de partir pour Londres le jour suivant, et ne pouvait, par conséquent, avoir l’honneur d’accepter... etc... »
Mrs. Bennet en fut toute décontenancée. Elle n’arrivait pas à imaginer quelle affaire pouvait appeler Mr. Bingley à Londres si tôt après son arrivée en Hertfordshire. Allait-il, par hasard, passer son temps à se promener d’un endroit à un autre au lieu de s’installer convenablement à Netherfield comme c’était son devoir ?... Lady Lucas calma un peu ses craintes en suggérant qu’il était sans doute allé à Londres pour chercher les amis qu’il devait amener au prochain bal. Et bientôt se répandit la nouvelle que Mr. Bingley amènerait avec lui douze dames et sept messieurs. Les jeunes filles gémissaient devant un nombre aussi exagéré de danseuses, mais, la veille du bal, elles eurent la consolation d’apprendre que Mr. Bingley n’avait ramené de Londres que ses cinq sœurs et un cousin. Finalement, lorsque le contingent de Netherfield fit son entrée dans la salle du bal, il ne comptait en tout que cinq personnes : Mr. Bingley, ses deux sœurs, le mari de l’aînée et un autre jeune homme.
Mr. Bingley plaisait dès l’abord par un extérieur agréable, une allure distinguée, un air avenant et des manières pleines d’aisance et de naturel. Ses sœurs étaient de belles personnes d’une élégance incontestable, et son beau-frère, Mr. Hurst, avait l’air d’un gentleman, sans plus ; mais la haute taille, la belle physionomie, le grand air de son ami, Mr. Darcy, aidés de la rumeur qui cinq minutes après son arrivée, circulait dans tous les groupes, qu’il possédait dix mille livres de rente, attirèrent bientôt sur celui-ci l’attention de toute la salle.
Le sexe fort le jugea très bel homme, les dames affirmèrent qu’il était beaucoup mieux que Mr. Bingley,