Le Leurre Zéro. Джек Марс

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Le Leurre Zéro - Джек Марс


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es agacé, observa Maya.

      – Nan, ça va. Je suis heureux comme un poisson dans l’eau. Il essaya de tourner cela en dérision avec un sourire, mais elle voyait clair dans son jeu. Tu sais que cette expression, dans sa forme actuelle, date de la fin du XVIIe siècle ? Avant on disait sain comme un poisson… »

      Il s’interrompit lorsqu’elle croisa les bras et haussa un sourcil. « Tu es agacé ou contrarié par quelque chose. Peut-être même les deux. Tu n’as pas enlevé tes chaussures quand tu es rentré, tu es allé directement chercher une bière et tu as fait ton truc de « je passe-ma-main-dans-les-cheveux-en-soupirant »…

      – Ce n’est pas un “truc”, argumenta-t-il.

      – Et à présent tu changes de sujet, finit-elle. Je te parie ce que tu veux que, dans moins d’une minute, tu vas suggérer que l’on commande une pizza ce soir. » La pizza était son repas de prédilection quand il avait trop de soucis en tête.

      « Oui, bon, d’accord, tu as raison, ajouta-t-il dans un murmure, parfois j’aurais aimé avoir des enfants un peu plus stupides ou un peu moins observateurs.

      – Tu ne voudrais pas me dire comment s’est passé ton “rendez-vous médical” ? demanda Maya. »

      Il y réfléchit un instant, puis lui dit : « Enfile une veste ».

      Elle récupéra son manteau et le suivit sur leur petit balcon, à peine assez large pour deux chaises et une petite table en verre de chaque côté, mais ils ne s’assirent pas ; son père referma la porte vitrée derrière eux et s’appuya à la balustrade.

      Maya boutonna sa veste jusqu’au cou pour se protéger de l’air froid hivernal et croisa les bras sur la poitrine. « Vas-y, je t’écoute.

      – Je recherche quelqu’un, lui dit-il d’une voix si basse qu’elle eut du mal à l’entendre. Un agent ou quelqu’un qui l’était jusqu’à il y a environ cinq ans. Appelé Connor.

      – Prénom ou nom ? » demanda Maya.

      Il haussa les épaules. « Aucune idée. Il pourrait très bien être mort et, si ce n’est pas le cas, il est drôlement bien caché. »

      Elle fronça les sourcils en se demandant pourquoi son père était à la recherche d’un agent possiblement décédé. « Pourquoi es-tu à sa recherche ? »

      Son père prit une gorgée de bière péniblement longue puis marmonna quelque chose dans sa barbe. Maya n’avait pas bien entendu, mais il lui semblait qu’il avait prononcé le mot « paperasse ».

      « Quoi ?

      – Rien, répondit-il. Je ne peux pas vraiment t’en parler. C’est lié… à mon travail.

      – Je comprends. » Cependant, étant donné son comportement et le fait qu’il n’était pas parti pour une chasse à l’homme avec toutes les ressources que la CIA allouait lors de ces missions de grande ampleur, elle supposa que cela n’avait rien à voir avec son travail. « Et tu me dis tout ça dehors sur le balcon, dans le froid glacial, parce que…? »

      Il ne répondit rien mais lui lança un regard dénué de toute émotion. Il lui fallut un moment pour l’interpréter mais, quand elle y arriva, son estomac se noua.

      « Oh mon Dieu, tu ne penses tout de même pas…? » Elle s’arrêta avant de le dire tout haut. Il pensait que leur appartement pouvait, d’une manière ou d’une autre, être sur écoute.

      « Je ne suis pas complètement sûr. Alan a fait quelques ratissages, mais ces gens-là ont tendance à se montrer créatifs. »

      Maya secoua la tête de dégoût à l’idée que tout ce qu’elle avait dit, et probablement ce qu’elle avait fait – ainsi que sa petite sœur – avait été enregistré quelque part dans une des bases de données de la CIA. On lui avait une fois implanté sous la peau une puce de traçage numérique et l’idée que ses moindres déplacements soient connus en permanence avait été suffisamment dérangeante.

      Cependant, de là à être observée… cela lui rappelait l’incident à West Point, avec les trois jeunes hommes qui s’étaient cachés dans les vestiaires, attendant qu’elle sorte de la douche afin de l’attaquer. Combien de temps avaient-ils pu passer là et qu’avaient-ils vu…?

      Elle s’obligea à ne pas y penser. Son père ne connaissait que le strict minimum de ce qu’il s’était passé et elle n’avait pour le moment pas l’intention de lui en dire plus. C’était à elle de gérer le problème, tout comme lui devait gérer le sien.

      « Que vas-tu faire, alors ? » lui demanda-t-elle.

      Il agita la main en signe d’impuissance. « Il y a un docteur, ou il pourrait y en avoir un, qui le connaît. Ou le connaissait. Je ne sais pas encore. J’attends plus d’infos de la part de Reidigger. » Il lui sourit en la regardant par-dessus son épaule. « Allez, viens, rentrons.

      – Attends une minute. Si tu es supposé ne pas m’en parler, pourquoi me dis-tu tout cela ? Il la fixa si longtemps qu’elle s’imagina que lui non plus n’était pas sûr de la réponse.

      – Parce que, dit-il enfin, quand je suis agacé, te parler m’aide à me sentir moins agacé. »

      Il lui serra l’épaule puis ils retournèrent à l’intérieur, juste à temps pour trouver Sara qui fermait la porte derrière elle et ôtait son bonnet de laine. Son nez et ses joues étaient rougis et gercés par l’air hivernal.

      Sara regarda son père puis hocha la tête. « Pizza ce soir, alors ? »

      Il leva les deux mains en l’air. « Je suis vraiment si prévisible ? »

      Maya sourit, puis elle remarqua qu’il y avait quelque chose d’étrange dans le comportement de Sara. Ses mouvements étaient raides, comme figés et pas uniquement à cause du froid, semblait-il. Même après avoir retiré son anorak, sa petite sœur gardait les coudes serrés, presque sur la défensive.

      « Ça va ? » demanda Maya.

      Sara renifla. « Ouais. C’est juste… mes conneries habituelles.

      – Doucement, les gros mots ! s’écria leur père depuis la cuisine. Puis : Oui, je voudrais deux grandes pizzas…

      – T’en fais pas, ça va », lui assura Sara en se dirigeant vers la chambre qu’elles partageaient.

      Maya ne la crut pas, mais elle savait qu’il était inutile d’insister. Ils avaient tous leurs problèmes et chacun essayait de les gérer à sa façon. Pour les membres d’une famille qui s’étaient promis d’être honnêtes les uns envers les autres, il semblait qu’ils gardaient tous beaucoup de secrets, mais ce n’était pas par malhonnêteté, il s’agissait d’indépendance, d’être capable de s’assumer.

      Même si parfois, il fallait bien l’admettre, cela les faisait se sentir bien seuls. Pourtant, il n’était peut-être pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Elle pensa à ce fameux Connor qui avait disparu. Il devait bien y avoir un moyen de retrouver ce type… peut-être même qu’une personne aussi intelligente qu’elle, pourrait y arriver. Peut-être pourrait-elle faire quelque chose pour son père qui lui prouverait, au lieu de seulement le lui dire, qu’il n’était pas obligé de garder ses problèmes pour lui seul.

      Si seulement elle pouvait apprendre à appliquer ses propres conseils.

      CHAPITRE SEPT

      Le président Jonathan Rutledge s’installa confortablement sur un canapé rayé du Bureau Ovale, retira les pieds de ses mocassins et posa ses talons sur la table basse cirée devant lui. Il était presque certain que le canapé, un des deux qui étaient perpendiculaires au bureau présidentiel, n’était pas là hier, mais il ne pouvait en être sûr. D’ordinaire, la pièce était toujours bourdonnante d’activité ; les conseillers, chefs d’état-major et administrateurs se pressaient ici et là,


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