La Cité Ravagée. Scott Kaelen

Читать онлайн книгу.

La Cité Ravagée - Scott Kaelen


Скачать книгу
pouvait juste distinguer les formes de plusieurs petites habitations à travers le mur de pluie. "C'est bien notre veine."

      "Ouais", souffla Dagra. "Peut-être bien."

      Comme ils reprirent leur marche, Jalis dit : "Au moins, sans forêt autour, il n'y aura pas de cravants cette fois-ci."

      Dagra approuva d'un grognement. "Restons sur nos gardes, cependant. Qui sait quelles autres surprises les Terres Mortes peuvent nous réserver."

      L'estomac d'Oriken gargouilla. Un toit et un peu de repos sont les bienvenus, mais je préférerais un lapin rôti. Je n'ai pas vu la moindre trace de ce qu'on pourrait appeler un repas. Mais comme ils approchaient des bâtiments, ses espoirs s'amenuisèrent. Les trois cabanes en bois étaient à un stade avancé de délabrement, et plusieurs constructions, plus petites, n'étaient guère plus que des tas de bois en décomposition. Les toits étaient partiellement effondrés, les portes manquaient ou étaient à moitié enfoncées dans le sol, et l'intérieur des bâtiments était envahi par la végétation et l'eau.

      Oriken dégaina son sabre et se dirigea vers la cabane la plus éloignée, laissant Dagra et Jalis inspecter les bâtiments les plus proches. Une brève inspection confirma qu'ils ne pourraient pas s'en servir comme abri et qu'il n'y avait rien qui vaille la peine d'être récupéré des restes des meubles véreux qui s'y trouvaient. Il s'approcha du côté effondré de la cabane, serpentant entre les débris recouverts de mousse. Derrière le bâtiment, plusieurs arbres courts et épineux poussaient au pied d'une butte à l'abri du vent ; derrière ceux-ci, il vit contre le flanc de la colline une ouverture faite de main d'homme, dont les poutres en bois était gondolées.

      "Il y a une mine par ici !" cria-t-il par-dessus son son épaule.

      Jalis apparut un instant plus tard. "Fais attention."

      Oriken inspecta l'entrée de la mine et regarda à l'intérieur. Avec un haussement d'épaule, il franchit le seuil. Les premières poutres portantes étaient visibles sur une courte distance ; puis, le reste du tunnel s'enfonçait dans les ténèbres. Il entra de quelques pas puis s'accroupit pour tâter le sol de ses doigts. Rassuré que le sol fut sec, il fit tomber son bardas par terre et posa son ceinturon par-dessus, puis il s'assit en s'adossant à la paroi du tunnel.

      Jalis se précipita dans l'entrée et repoussa sa capuche avec un soupir. Un instant plus tard, Dagra entra derrière elle, secouant les gouttes de pluie de son manteau. Dehors sur la lande, le vent soufflait et la pluie tombait plus fort.

      Une fois débarrassée de son équipement, Jalis s'assit les jambes croisées à côté d'Oriken. "Dès que la pluie s'arrêtera, on repartira."

      "Là où il y a une mine, il devrait se trouver un village non loin," dit Oriken.

      Dagra émit un grognement indistinct. "Ce village sera dans le même état que ces cabanes de mineurs au dehors. Ces maisons aux abords n'avaient l'air désertées que depuis quelques décennies mais cette mine a été abandonnée depuis au moins cent ans."

      "Il a raison," dit Jalis. "Pas grand-chose à en attendre. Et puis, les bois ici sont beaucoup plus clairsemés ; ce qui est bien, c'est qu'on a peu de chance d'y rencontrer des cravants."

      "Voilà," marmonna Dagra en passant devant eux. "Plus de surprises. Moi, ça me va." Il laissa tomber son bardas contre le mur et s'assit à côté, posant son glaive sur son giron.

      Oriken observait les bâtiments en ruines dehors. Il se demandait comment pouvaient bien être les mineurs de l'époque, s'ils avaient été comme son père. Gonflant ses joues, il regarda dans la direction opposée, dans les ténèbres du tunnel. "Eh, attendez," souffla-t-il. "Est-ce que... Dag, fais attention !"

      Une forme s'élança vers Dagra. Il se remit sur pied en un éclair pour faire face à l'attaque, coupant l'air de son épée en direction de la forme sombre. Avec un grognement, l'attaquant attrapa Dagra par le cou ; celui-ci planta son glaive dans l’estomac de son assaillant, imprimant à la grande lame un mouvement vers la poitrine. Les mains autour du cou de Dagra se relâchèrent et son assaillant s'affaissa sur lui. Il arracha la lame de la forme qui s'effondra au sol. Tout cela n'avait pris que quelques secondes, mais Oriken et Jalis avait dégainé leurs armes et se tenaient prêts à les faire tous sortir du tunnel. Le moment s'étira mais rien ne vint. Oriken lança un regard en direction de Dagra dont les yeux fixaient le corps à ses pieds.

      Puis, Oriken fit de même. "Merde," dit-il en découvrant le corps recouvert d'une peau sale et couverte de plaies, la longue chevelure poisseuse et la barbe hirsute d'un homme nu.

      Dagra grogna, marcha jusqu'à l'entrée et regarda au dehors dans la pluie.

      "Un ermite ?" se demanda Jalis. "Y en a-t-il d'autres au fond de la mine ?"

      "Un imbécile, en tout cas", dit Oriken. "Qu'est-ce qui lui a pris ?"

      "Nous avons envahi son habitation." Dagra continuait de leur tourner le dos. "Il ne faisait que se protéger."

      Jalis secoua la tête. "Nous ne l'avons pas menacé," dit-elle à Dagra.

      "Nous devrions le brûler."

      Oriken lança les mains en l'air. "Excellente idée. Je vais aller chercher du bois pour faire du feu. Hein, c'est pas ce qui manque, en plus, il ne pleut pas une goutte."

      "Très bien !" Dagra se tourna vers eux. "Au moins, tirons-le plus vers l'intérieur, si nous devons rester un peu."

      "Ouais, ça je peux le faire," dit Oriken en essayant de masquer son sarcasme.

      Dagra le fixa du regard puis, après quelques instants, fit un bref signe de la tête.

      Oriken attrapa l'ermite par les poignets et tira le corps vers l'intérieur du tunnel, tout en restant sur ses gardes. L'obscurité était totale, mais les entrées de mine, il les connaissait bien. Cinquante pas plus loin, le tunnel faisait un angle ; il laissa le corps dans le coin. Pendant près d'une minute, il se tint debout là à regarder dans les ténèbres, des pensées tentant de se former à l’orée des émotions qu'il ressentait.

      "Orik !" La voix de Jalis retentit dans le tunnel. "Tu vas bien ?"

      "Ça va," dit-il. Il jeta un dernier regard vers les ténèbres et se retourna pour rejoindre ses amis.

      "Tu n'avais pas besoin de partir si loin," dit Dagra alors qu'Oriken approchait de l'entrée.

      "Je ne suis pas allé loin. J'étais juste en train de penser."

      "Tu choisis de ces endroits, toi, pour faire de l'introspection," fit Jalis. "Dans une mine abandonnée, dans le noir, à côté d'un cadavre."

      "Un peu de respect s'il te plaît, jeune fille," intervint Dagra. "Cet homme était vivant il y a encore quelques minutes."

      "C'est lui qui nous a attaqués," dit Jalis, "pas nous. Tu t'es défendu. Tu n'as rien à te reprocher."

      "Je n'avais pas à le tuer."

      "Non, mais tu ne pouvais pas savoir s'il était dangereux, ni même s’il était humain, après il aurait été trop tard. Ne te blâme pas pour ça. Nous avons encore du chemin à faire et nous devons rester aussi affûtés que nos armes."

      Dagra marmonna une sorte de reconnaissance. "J'aimerais que cette satanée pluie s'arrête, qu'on puisse s'en aller."

      Jalis sourit. "Voilà qui est mieux."

      Oriken s'assit par terre, le dos contre le mur.

      Jalis s'assit à nouveau près de lui, les jambes croisées. "Quelque chose qui ne va pas ?"

      "Non, rien."

      Elle étudia son visage. "Eh, c'est à moi que tu parles. Je peux voir ton âme."

      Il ricana. "Ah pas de souci, je n'en ai pas."

      Dagra les rejoignit. "Tu n'es pas obligé de croire aux Dyades pour avoir une âme," dit-il. "Tout le monde en a une. Même toi."

      "Ouais, peut-être."


Скачать книгу