Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 3 - (C suite). Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc

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Jean de Marmoutier, moine chroniqueur du XIIe siècle, raconte que Geoffroy Plantagenet, grand-père de Richard Coeur de Lion, assiégeant un certain château fort, étudiait le traité de Végèce.

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... «Mes l'autre (la seconde enceinte) est quatre tanz plus bèle, Trop sont plus bèles les entrées; Et les granz tours, dont les ventrées Ens el fonz du fossé s'espandent, Trop plus haut vers le ciel s'estandent. ... Entre les deus a grant espace, Pour ce que, se l'en préist l'une, L'autre à deffendre fut commune. Tout amont comme en réondèce, Resiet la mestre forterèce (la dernière enceinte) Qui rest noblement façonnée, Et de fossez environnée; Onques tiex ne feurent véuz. S'un rat estoit dedanz chéuz, Là seroit qui ne l'iroit querre.» (Guill. Guiart, vers 3238 et suiv.)

En effet, les fossés sont creusés à pic, et, comme le dit Guillaume, nul n'aurait pu aller chercher un rat qui serait tombé au fond.

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Les constructions sont dérasées aujourd'hui au niveau du point O (fig. 13); il est probable que des hourds ou bretèches se posaient, en cas de siège, au sommet de la partie antérieure des segments, ainsi que nous l'avons indiqué en B, afin d'enfiler les fossés, de battre leur fond et d'empêcher ainsi le mineur de s'y attacher. Nous en sommes réduits sur ce point aux conjectures.

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«Pluseurs François garnis de targes, Que l'en doit entiex faiz loer, Prennent nus par Sainne à noer; À dalouères et à haches, Vont desrompant piex et estaches; Les gros fuz de leur place lièvent. Cil de Gaillart forment les grièvent, Qui entr'eus giètent grosses pierres, Dars et quarriaus à tranchanz quierres, Si espés que tous les en queuvrent. Non-pour-quant ileuques tant euvrent, Comment qu'aucuns ocis i soient, Que les trois paliz en envoient, Ronz et tranchiez, contreval Sainne, Si que toute nef, roide ou plainne Puet par là, sans destourbement, Passer assez legièrement.» (Guill. Guiart, vers 3310 et suiv.)

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«Anglois meuvent, le jour décline; Leur ost, qui par terre chemine, S'en va le petit pas serrée. Là ot tante lance serrée, Tante arbaleste destendue, Et tante targe à col pendue, Painte d'or, d'azur et de sable, Que li véoirs est délitable. (Guill. Guiart, vers 3445 et suiv.)

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Ce passage explique parfaitement l'assiette du camp de Philippe-Auguste qui se trouvait en R (fig. 10), précisément au sommet de la colline qui domine la roche Gaillard et qui ne s'y réunit que par cette langue de terre dont nous avons parlé. On voit encore, d'ailleurs, les traces des deux fossés de contrevallation et de circonvallation creusés par le roi. Ces travaux de blocus ont les plus grands rapports avec ceux décrits par César et exécutés à l'occasion du blocus d'Alesia; ils rappellent également ceux ordonnés par Titus lors du siége de Jérusalem.

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C'est le sentier qui aboutit à la poterne S (voy. la fig. 11); c'était en effet la seule entrée du château Gaillard.

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Cette chaussée est encore visible aujourd'hui.

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La fig. 14 représente à vol d'oiseau le château Gaillard au moment où, les approches étant à peu près terminées, les assiégeants se disposent à aller combler le fossé. On voit en A l'estacade rompue par les gens de Philippe-Auguste pour pouvoir faire passer les bateaux qui devaient attaquer l'île B; en C le Petit-Andely, en E l'étang entre le petit et le grand Andely; D les tours de la ligne de circonvallation et de contrevallation tracée par Philippe-Auguste, afin de rendre l'investissement du château Gaillard complet; F le val où moururent de faim et de misère la plupart des malheureux qui s'étaient réfugiés dans le château et que la garnison renvoya pour ne pas épuiser ses vivres. On voit aussi, à l'extrémité de la chaussée faite par l'armée assiégeante, pour arriver par une pente au fossé de l'ouvrage avancé, deux grandes pierrières qui battent la tour saillante contre laquelle toute l'attaque est dirigée; puis, en arrière, un beffroi mobile que l'on fait avancer pour battre tous les couronnements de cet ouvrage avancé et empêcher les assiégés de s'y maintenir.

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Il s'agit ici, comme on le voit, de tout l'ouvrage avancé dont les deux murailles, formant un angle aigu au point de leur réunion avec la tour principale A, vont en déclinant suivant la pente du terrain. La description de Guillaume est donc parfaitement exacte.

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La fidélité scrupuleuse de la narration de Guillaume ressort pleinement lorsqu'on examine le point qu'il décrit ici. En effet, le fossé est creusé dans le roc, à fond de cuve; il a dix mètres de large environ sur sept à huit mètres de profondeur. On comprend très-bien que les soldats de Philippe-Auguste, ayant jeté quelques fascines et des paniers de terre dans le fossé, impatients, aient posé des échelles le long de la contrescarpe et aient voulu se servir de ces échelles pour escalader l'escarpe, espérant ainsi atteindre la base de la tour; mais il est évident que le fossé devait être comblé en partie du côté de la contrescarpe, tandis qu'il ne l'était pas encore du côté de l'escarpe, puisqu'il est taillé à fond de cuve; dès lors les échelles qui étaient assez longues pour descendre ne l'étaient pas assez pour remonter de l'autre côté. L'épisode des trous creusés à l'aide de poignards sur les flancs de la contrescarpe n'a rien qui doive surprendre, le rocher étant une craie mêlée de silex. Une saillie de soixante centimètres environ qui existe entre le sommet de la contrescarpe et la base de la tour a pu permettre à de hardis mineurs de s'attacher aux flancs de l'ouvrage. Encore aujourd'hui, le texte de Guillaume à la main, on suit pas à pas toutes ces opérations de l'attaque, et pour un peu on retrouverait encore les trous percés dans la craie par ces braves pionniers lorsqu'ils reconnurent que leurs échelles étaient trop courtes pour atteindre le sommet de l'escarpe.

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C'est le bâtiment H tracé sur notre plan, fig. 11.

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C'étaient les latrines; dans son histoire en prose, l'auteur s'exprime ainsi: «Quod quidem religioni contrarium videbatur.» Les latrines étaient donc placées sous la chapelle, et leur établissement, du côté de l'escarpement, n'avait pas été suffisamment garanti contre une escalade, comme on va le voir. Les latrines jouent un rôle important dans les attaques des châteaux par surprise; aussi on verra comme, pendant les XIIIe et XIVe siècles, elles furent l'objet d'une étude toute spéciale.

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C'est le pont marqué sur notre plan et communiquant de l'ouvrage avancé à la basse-cour E.

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C'est le pont L (fig. 14).

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Un chat (voy. ARCHITECTURE MILITAIRE).

«Un chat fait sur le pont atraire.» (Guill. Guiart, vers 4340.)

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Richard avait eu le tort de ne pas ménager des embrasures à rez-de-chaussée pour enfiler ce pont, et le chat garantissant les mineurs français contre les projectiles lancés du sommet de la muraille, les assiégé


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