Traité de la Vérité de la Religion Chrétienne. Hugo Grotius

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Traité de la Vérité de la Religion Chrétienne - Hugo Grotius


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Divinité est généralement répandue par tout. D'ailleurs, comme l'a aussi reconnu ce Philosophe, le tems qui change toutes les choses de pure institution, n'a jamais pu altérer celle-ci. D'où vient donc cette créance, sinon d'une cause qui agit naturellement sur l'esprit de tous les hommes du monde? Or cette cause ne peut être que l'une de ces deux-ci: une révélation expresse, émanée de Dieu, ou une tradition, qui de main en main ait passé des premiers hommes jusques à nous. La premiére décide la question en notre faveur; puis qu'il n'y peut avoir de révélation divine, qu'il n'y ait un Dieu. Si l'on dit que c'est une tradition, qu'on nous aporte quelque raison, qui puisse nous faire croire que ces premiers hommes ont eu dessein, dans une afaire de cette importance, d'en imposer à toute leur postéritéB. Ajoutez à cela, que soit que nous jettions les yeux sur toutes les parties de l'ancien Monde, soit que nous regardions toutes celles du nouveau, nous ne verrons aucuns Peuples, (je ne parle pas de ceux qui n'ont presque de l'homme que la figure) nous ne verrons, dis-je, aucuns Peuples qui ne reconnoissent une Divinité, quoi qu'à dire vrai, la connoissance qu'ils en ont soit distincte ou confuse, à proportion de leur politesse & de leurs lumiéres. Or peut-on se persuader que ceux d'entre ces Peuples qui ont eu des lumiéres, ayent pu être trompez ou que ceux en qui l'on remarque de la stupidité, ayent pu entreprendre de se tromper les uns les autres?

      Que l'on n'objecte point ici ce peu d'hommes, qui dans un grand nombre de siécles ont cru, ou fait profession de croire, qu'il n'y a point de Dieu. Leur petit nombre, & l'oposition générale qu'ils ont rencontrée, lors qu'ils ont voulu introduire leurs sentimens, font voir que ces sentimens n'étoient pas le fruit du bon usage que ces gens faisoient de leur Raison; mais un éfet, ou de l'amour de la nouveauté, passion dont la bizarrerie a quelquefois été jusques à faire soutenir que la neige est noire: ou d'un esprit corrompu, qui de même qu'un goût dépravé, juge des choses, non selon ce qu'elles sont en elles-mêmes, mais selon ce qu'elles lui paroissent. En éfet, tant les Livres historiques que ceux d'un autre genre, nous aprennent que les hommes ont conservé l'idée d'une Divinité, à proportion de la droiture de leur coeur. Il paroît donc que cet éloignement pour une opinion si ancienne & si universelle, est une suite de la dépravation de l'esprit & qu'elle n'a guére pu se trouver qu'en ceux, à qui il importe souverainement qu'il n'y ait point de Dieu, c'est à dire, point de Juge de leurs déréglemens.

       Qu'il n'y a qu'un Dieu.

      III. Nous avons prouvé qu'il y a un Dieu: venons à ses atributs. Le premier qui se présente, c'est l'Unité. Elle se recueille 1. de ce que nous avons déjà établi, c'est que Dieu est un Être, qui existe nécessairement & par soi-même. Or une chose est dite être nécessairement & par elle-même, non entant qu'on la considére dans une idée générale, & dans l'indétermination à être ou à n'être pas, mais entant qu'elle existe actuellement. Cela posé, je dis que si l'on établit qu'il y a plusieurs Dieux, l'on ne trouvera rien en chacun d'eux qui le fasse exister nécessairement; rien même qui oblige à en admettre deux plutôt que trois, ou dix plutôt que cinq. 2. La multiplicité des Êtres particuliers de même espéce, vient de la fécondité de leurs principes, qui, selon qu'elle est plus ou moins grande, les rend capables de plus ou de moins de productions: or Dieu n'a ni principe ni cause.


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