Programme des Épouses Interstellaires Coffret. Grace Goodwin
Читать онлайн книгу.il boucle ma ceinture et vérifie qu’elle est bien attachée, comme si j’étais une gosse, et non pas une femme tout à fait capable de s’occuper d’elle-même. Je ne moufte pas tandis que ses larges mains effleurent mon ventre et ma hanche en bouclant ma ceinture. Sa chaleur suffit à repousser la sensation de froid qui m’envahit.
J’ai failli être tuée par ces trucs extraterrestres, l’adrénaline commence à redescendre, je ne vais pas tarder à m’effondrer. Mes blessures me font mal, je sens mon cœur battre dans chacune de mes plaies. Mes muscles sont endoloris et tremblent, je me concentre pour respirer profondément. Mes mains tremblent et je frissonne, je suis gelée.
Il m’installe et fait le tour côté conducteur. Je réprime un fou rire tandis qu’il essaie de caser son immense carcasse derrière le volant minuscule, la voiture est visiblement trop petite pour lui. Un désodorisant senteur fleurie est posée sur la ventilation, un ange gardien est suspendu au rétroviseur, la voiture sent la lavande. « À qui est la voiture ?
– À la gardienne Egara. » Il allume le moteur et met le chauffage. Merci mon Dieu. Je claque des dents depuis que je ne suis plus au chaud dans ses bras.
« C’est elle qui t’a donné les téléphones portables et les écouteurs ? » demandais-je en posant ma tête sur l’appuie-tête.
« Tu es observatrice, mon épouse. Oui, elle m’a remis cet appareil de télécommunications primitif. »
Il sourit et démarre. Nous ne sommes pas très loin du centre de recrutement des épouses, si c’est bien là qu’il compte m’amener. À vrai dire, je me fiche de notre destination. Il n’a pas l’air de me vouloir du mal, ce qui n’est pas le cas de la plupart des hommes de cette ville. Si Clyde est au courant de mes investigations, les autres doivent l’être aussi. Personne n’ira me chercher au centre de recrutement puisque personne ne sait que j’y suis allée, c’est une bonne idée de planque. Vu ce qui s’est passé avec la gardienne Egara, je lui fais confiance pour jeter un œil sur mes blessures.
Hors de question d’aller à l’hôpital. Plutôt mourir que filer mes coordonnées à leur système informatique. Le cartel a des yeux et des oreilles. Clyde mort, ses sbires du cartel savent certainement que je suis toujours sur Terre, ils viendront me chercher dès que mes coordonnées seront enregistrées dans la base de données de l’hôpital. Je le sais pertinemment.
Je ferme les yeux et m’appuie contre la portière, trop épuisée moralement pour songer à autre chose que fermer les yeux et réfléchir à ce qui se passe. La mort de Clyde est un choc, moins que sa trahison toutefois. Ça me ronge, la douleur, la sensation d’avoir perdu mon innocence me donne envie de pleurer. Il était comme un père pour moi et je lui faisais une confiance aveugle. Je passe pour la petite fille qui a toujours fait confiance à son papa parce qu’elle était trop naïve, trop jeune pour comprendre que l’homme qui lui tenait la main était un monstre.
Clyde a été mon commandant pendant deux ans. Il m’a prise sous son aile, m’a formée au tir, à me défendre, m’a encouragée à me sentir invincible, à me battre. Il m’a fait croire que nous œuvrions pour le bien dans le monde, que nous faisions la différence au combat entre le bien et le mal. Et pendant tout ce temps, il mentait. C’était le diable en personne et je n’y ai vu que du feu.
La douleur s’intensifie quand j’y pense, et remue le couteau dans la plaie. Comment est-il devenu si maléfique ? Pourquoi ne m’en suis-je pas aperçue ? J’aurais dû. Ou du moins, avoir des soupçons. J’ai peut-être tout simplement fermé les yeux.
J’étais vraiment si faible et désemparée pour ne rien remarquer ?
Je me suis toujours fiée à mon instinct, mais cette fois-ci, mon instinct m’a trahie. Ça me blesse au plus haut point. J’ai l’impression d’être sur un terrain instable, je déteste ça.
Clyde est mort aux mains de la Ruche. J’ai été sauvée par mon partenaire et son second, Ander. Mon partenaire ! Son arrivée, la présence de l’homme idéal dans tout l’univers me concerne tout particulièrement. Il conduit, je suis à sa merci.
Et sa carrure ! Il est plus grand que tous les hommes que j’aie rencontrés, plus déterminé. Plus … tout. Il remarque que je l’observe et plisse les yeux, avant de reporter son attention sur la route. « Ne t’inquiète pas. La technologie de la Ruche ne va pas te contaminer.
– Quoi ? » Me contaminer ? Il est dingue ? Je n’aurais pas dû monter dans la voiture ? Je pourrais sauter à un stop mais il me rattraperait. Il est indubitablement plus grand, plus fort, plus entraîné et il me surveille de près.
Il fait la grimace, il serre le volant, comme s’il allait le casser. « La technologie de la Ruche ne te fera aucun mal.
– De quoi tu parles ? Le truc argenté ? »
Il me regarde d’un air étonné, surpris par ma réponse, je n’ai franchement pas la moindre idée de ce dont il parle. « Oui. J’ai été capturé par la Ruche et torturé par leur équipe ‘spéciale implants’ pendant des heures. La plupart ont été enlevés. Ce que tu vois est définitif. Je porte leur marque sur mon épaule, mon dos et ma jambe. »
Je suis vraiment désolée pour lui. La Ruche a vraiment fait des dégâts. J’ai entendu trop d’histoires de tortures et de souffrances des soldats tombés derrière les lignes ennemies. Et je suis bien placée pour savoir que certaines blessures ne se voient pas.
« C’est dangereux ?
– Non.
– Ça fait mal ?
– Non.
– Ok. » Je hausse les épaules et regarde la route. « Et donc ? Ça t’a rendu super rapide ou doué d’une force surhumaine ? Tu guéris plus vite et tu as le dessus lors d’un combat ? » Je frissonne, je me demande tout ce que je pourrais faire avec des tas d’implants cyborg. Je serais comme les femmes bioniques puissance dix. Je m’achèterais un costume et jouerais à la super héroïne pour de vrai. Ce serait top. Je serais habillée en noir de la tête aux pieds et j’enverrais ces sales types aux oubliettes.
Il garde le silence un très long moment, je me retourne vers lui.
« Oui. Je suis bien plus fort que la majorité des guerriers. Les implants accroissent ma vitesse de réaction. » Il me regarde, l’air perplexe. « Tu poses de drôles de questions. T’as pas peur de moi ? »
J’éclate de rire. Je suis dans sa voiture, blessée, un horrible monstre extraterrestre a essayé de me tuer. « Tu es la chose la moins effrayante que j’ai affrontée ces jours-ci. »
Il me jette un regard noir, je regarde les arbres défiler par la fenêtre.
Génial. Je l’ai insulté. Je le connais depuis dix minutes à peine et j’ai déjà mis les pieds dans le plat. Il m’a déjà reprise une première fois. Que fait-il ici ? Avant que je ne me retrouve coincée sur ce fauteuil d’examen au centre de recrutement, et que mon transfert ait été annulé, j’avais ressenti de l’exaltation et de l’excitation, j’avais hâte de le rencontrer. Et maintenant ? Je n’éprouve aucun soulagement. Aucun espoir. Je me sens blessée. Trahie.
Qu’est-ce qu’il fout ici ? Que s’est-il passé ? Une personne est susceptible de lui convenir ? Je veux connaître la réponse, mais ma fierté m’empêche de lui poser la question. Il est là en personne, mais qui est Ander ? Un second ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Et pourquoi Ander, cet étrange homme extraterrestre, est si obsédé par moi—j’ai jamais rencontré d’extraterrestre—il est prêt à tuer et s’en vante ?
Ce qui me tarabuste surtout, c’est pourquoi est-ce que ça m’excite ? Je n’aime pas trop les gros bras en général. Voire, pas du tout. Je suis très bien toute seule. D’après mon expérience, les hommes sont trop narcissiques pour supporter une femme au caractère bien trempé. Ils veulent des gamines gnangnan qui se pâment devant eux et leur disent qu’ils sont des bêtes au lit, qu’ils sont beaux et forts,