Programme des Épouses Interstellaires Coffret. Grace Goodwin

Читать онлайн книгу.

Programme des Épouses Interstellaires Coffret - Grace Goodwin


Скачать книгу
fois.

      Prillon Prime. « Maintenant ?

      – Oui, maintenant. »

      Le ton sec de la gardienne Egara est la dernière chose que j’entends, hormis le léger bourdonnement des équipements électriques et de l’éclairage. « Le processus débutera dans trois… deux … »

      Je me raidis, j’attends la fin du compte à rebours mais une lumière rouge s’allume au-dessus de moi, elle incline la tête et regarde un écran situé hors de mon champ de vision.

      « Non. Ce n’est pas possible. » Elle passe de l’état de choc à la perplexité, tandis que j’attends, toute nue, dans cette putain d’eau bleue—pourquoi suis-je nue et où est passée ma blouse ?—j’ai l’impression d’être saoule.

      « Qu’est-ce qui se passe ?

      – Je ne sais pas, Jessica. C’est la première fois que ça arrive. » Elle regarde sa tablette d’un air renfrogné, ses doigts volent littéralement sur l’écran, comme si elle tapait un message très long et compliqué.

      « Qu’est-ce qui se passe ? »

      Elle secoue la tête, les yeux ronds, totalement perplexe. « Prillon Prime rejette votre transfert. »

      Ça veut dire quoi putain ? Mon transfert est refusé ? Ils veulent que j’y aille comment, en navette spatiale ? Leur navette est en panne ou n’a plus de batterie ?

      « Je ne comprends pas.

      – Moi non plus. Le protocole est achevé en ce qui les concerne. Ils ne valident pas votre arrivée, ni votre droit à prendre un partenaire. »

      2

       Jessica

      Attachée sur la table, je ne peux que regarder la gardienne Egara pianoter sur sa tablette d’un air concentré. Je me débats pour me libérer, même si c’est parfaitement inutile. La boîte de réception n’arrête pas de sonner à chaque nouveau message, elle fronce encore plus les sourcils, ses doigts se déplacent à tout allure en mouvements brefs, comme si elle voulait frapper celui avec lequel elle parle à l’autre bout de l’espace.

      J’ai appris la patience à la dure durant mes années en tant que soldat, et plus tard, en tant que journaliste d’investigation. Je peux traquer ma proie pendant plusieurs jours sans jamais m’en lasser. Je sais quand il faut attendre et lorsqu’il faut tirer. Dans ce cas de figure en particulier, mon agressivité ne m’apportera rien, même si ma frustration est si grande que je pourrais arracher les liens du fauteuil comme l’Incroyable Hulk.

      « Gardienne, je vous en prie, dites-moi ce qui se passe. »

      Oui, ça sonne bien. Vive moi.

      La gardienne se mord la lèvre inférieure, elle ressemble soudainement à la femme d’une vingtaine d’années qu’elle est au naturel. Ses épaules sont voûtées, comme si elle portait un poids et une lourde responsabilité. C’est peut-être le cas. Il lui incombe de faire en sorte que toutes les femmes—peu importe la raison—soient accouplées de façon satisfaisante et arrivent saines et sauves à destination, quelque part dans l’univers. Elle lève enfin les yeux, je sais immédiatement en voyant son regard sombre que les nouvelles ne sont pas bonnes, du moins celles me concernant.

      Une terreur sourde m’envahit.

      « Ils vous ont expressément rejetée, contrairement à toutes les autres volontaires en provenance de la Terre. » Elle soupire, j’ai l’impression qu’on vient de m’annoncer que je suis la fille la plus moche de toute la classe. Ouais, la sensation est toujours aussi cuisante. J’ai déjà ressenti ça, plusieurs fois, quand c’est moi qui ait été rejetée. Par des amis, des amants, le boulot, la famille. Je devrais y être habituée mais ce n’est pourtant pas le cas. L’espoir rend stupide. Je ne m’étais pas rendue compte à quel point j’avais envie de rencontrer quelqu’un, quelqu’un qui serait là pour moi, jusqu’à ce qu’on m’envoie balader. Comme d’habitude.

      « Un autre transfert est en approche depuis notre Centre de Recrutement des Epouses situé en Asie, le problème n’est donc pas inhérent au système. Pour une raison que j’ignore, vous n’avez pas pu embarquer. Le Prime a envoyé le message en personne. »

      Le Prime ? Putain c’est quoi un ‘prime’ ?

      « Vous voulez dire mon partenaire ? »

      Elle secoue la tête d’un air absent. « Non. Le Prime. Le souverain de leur planète. Le souverain de Prillon Prime. »

      Elle a énoncé son titre avant même le nom de sa planète, il m’a personnellement rejetée. Génial.

      « Un peu comme un roi ? » Merde alors. Leur souverain refuse que je prenne un partenaire ? Je n’ai jamais rencontré le guerrier avec lequel j’ai été accouplée, il était censé m’appartenir et me voilà interdite de séjour, envolée la petite lueur d’espoir. Merde. Mon espoir s’amenuise et s’évanouit. Ça fait mal.

      « Oui. Il règne sur plusieurs planètes, il commande toute la flotte interstellaire, » grommelle-t-elle en détournant les yeux, incapable de soutenir mon regard.

      J’ai un mouvement de recul involontaire, ses paroles me donnent la nausée. J’ai été rejetée par le roi extraterrestre de la planète entière ? Je suis si nulle que ça ? Je suis autoritaire et un peu chiante sur les bords. J’ai un caractère bien trempé pour une femme mais quelle femme n’aime pas se frotter à des méchants garçons et les dégommer ? Merde. Le Prime exige une demoiselle raffinée pour son alter ego sur Prillon. Ça doit être ça. Vraiment ?

      J’ai l’esprit confus, je lui pose la seule question qui me vient à l’esprit. « Pourquoi ? Ils me prennent pour un trafiquant de drogue ? »

      Il vaut mieux que l’accès me soit refusé pour trafic de drogue que pour mon côté garçon manqué.

      « Mademoiselle Smith, ils ne vous prennent pas pour un trafiquant de drogue. Ils savent que vous êtes inculpée de trafic de drogue. Pourtant, j’ai déjà envoyé des filles coupables de meurtre. J’ignore ce qui leur prend. »

      Elle secoue tristement la tête et appuie sur une série de boutons sur sa tablette. Je sors de l’eau, la lumière douce m’empêche de me concentrer, je m’aperçois alors que je n’ai plus un seul poil sur tout le corps. Les nouveaux implants dans mon crâne me donnent une horrible migraine, ma tête bourdonne, on dirait un bruit de parasites dans un haut-parleur.

      Mon corps est à nouveau placé sur le fauteuil d’examen, la gardienne Egara me couvre avec une couverture grise. « Je suis sincèrement désolée, Jessica. C’est la première fois que ça arrive. Je vais envoyer une requête officielle à la Coalition Interstellaire pour savoir ce qui s’est passé. »

      Je suis nue et je dégouline d’eau bleutée, la couverture me gratte et je suis toujours attachée à cette foutue table. Est-ce possible que ça soit pire ? « Ça va prendre combien de temps ? » Le bourdonnement dans ma tête augmente.

      « Au moins plusieurs semaines. » Sa voix est amplifiée comme si un mégaphone était situé à un centimètre de mon oreille et je grimace.

      Elle penche la tête en me voyant grimacer et me laisse un moment, elle revient avec une piqûre qu’elle m’injecte dans le cou. Je tressaille.

      La piqûre surprise en valait la peine, la douleur dans ma tête s’évanouit en l’espace de quelques secondes.

      « Je suis désolée pour cette sensation pénible. La majeure partie des épouses s’endorment pendant le processus d’intégration des neurostimulateurs. » Elle me regarde d’un air affable, je ne l’ai jamais vue ainsi. Je cligne des yeux devant une


Скачать книгу