Jane Austen: Oeuvres Majeures. Джейн Остин

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Jane Austen: Oeuvres Majeures - Джейн Остин


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plairaient beaucoup plus qu’un léger rhumatisme à l’épaule, dont le colonel se plaignait hier par un jour froid et humide.

      Maria sourit d’abord de ce badinage, puis tomba dans la rêverie ; un instant après elle demanda à sa sœur un livre que celle-ci avait dans sa chambre. Elinor sortit pour aller le chercher ; dès qu’elle fut dehors, Maria s’approcha vivement de sa mère. J’ai pris ce prétexte de renvoyer Elinor, lui dit-elle, pour vous parler d’une crainte qui m’a saisie tout-à-coup quand elle a parlé de fièvre. Je suis sûre qu’Edward Ferrars est très-malade, ne le pensez-vous pas aussi ? Voici quinze jours que nous sommes ici, et il n’y a pas encore paru : rien autre chose qu’une maladie sérieuse ne peut expliquer ce retard. Qu’est-ce qui pourrait le retenir à Norland quand Elinor est ici ? Je ne comprends pas qu’elle ne soit pas aussi malade d’inquiétude.

      — Aviez-vous donc quelque idée qu’il dût venir aussitôt, répondit madame Dashwood ? Je ne le croyais pas, bien au contraire ; si j’avais eu sur lui quelque inquiétude, ç’aurait été plutôt en me rappelant qu’il n’avait pas eu beaucoup d’empressement à accepter mon invitation quand je le priai de venir nous voir. Est-ce donc qu’Elinor l’attendait déjà ?

      — Nous n’en avons point parlé, maman, mais il me semble que cela va sans dire.

      — Moi, je crois, ma fille, que vous vous trompez ; je lui parlai hier de quelques petites réparations à faire à la chambre destinée aux visiteurs ; elle observa que rien ne pressait, et que de long-temps cette chambre ne serait occupée.

      — C’est bien singulier, dit Maria ! Quelle peut être leur idée ! au reste toute leur conduite est inexplicable d’un bout à l’autre. Si vous aviez vu la froideur de leur dernier adieu, si vous aviez entendu comme leur entretien était simple et presque languissant la dernière soirée. Edward ne mit aucune distinction dans ses adieux entre Elinor et moi ; c’étaient pour toutes deux les bons souhaits d’un frère affectionné, et rien, rien de plus pour elle. Quelquefois je les laissais exprès, croyant peut-être qu’ils étaient gênés par ma présence ; eh bien ! croiriez-vous qu’il restât près d’elle ? Il sortait avec moi, ou immédiatement après. Et Elinor ! elle ne pleurait pas même autant que moi en quittant Norland, et actuellement elle a tout-à-fait l’air consolée. La voit-on abattue, mélancolique ? Cherche-t-elle à éviter la société ? Parait-elle seulement distraite ou rêveuse ? Non, maman, je ne sais plus qu’en penser, elle déroute toutes mes notions sur l’amour.

      — Et les miennes aussi, dit madame Dashwood ; mais Elinor est si sage, si raisonnable, que nous ne pouvons pas nous permettre de la condamner.

      CHAPITRE IX.

       Table des matières

      La famille Dashwood était actuellement tout-à fait établie à Barton, et s’y trouvait mieux de jour en jour. Leur habitation simple et commode, leur petit jardin, tout ce qui les entourait leur était devenu familier ; et leurs occupations journalières, qui avaient tant d’attrait pour ces jeunes personnes à Norland, avant la mort de leur bon père, et qui depuis ce triste événement avaient perdu plus de la moitié de leur charme, se retrouvaient en entier dans cette demeure. Elles n’éprouvaient que des sentimens doux et consolans, et la mère et les trois filles ne cessaient de se féliciter de leur changement de demeure. Sir Georges Middleton venait les visiter tous les matins, et n’ayant pas l’habitude de voir sa femme occupée à rien d’agréable ou d’utile, il ne pouvait assez s’étonner de les trouver toujours à travailler ou à étudier. Elles n’avaient presque pas d’autres visites que la sienne ; car malgré ses sollicitations réitérées de leur faire faire connaissance avec tout son voisinage, en leur disant que son équipage serait toujours à leur service, l’esprit indépendant de madame Dashwood s’y était absolument refusé, et l’avait emporté même sur son désir de l’amusement de ses filles. Elle déclara positivement qu’elle ne verrait que les personnes chez qui elle pourrait aller à pied en se promenant. Le nombre de celles-là était fort borné, et même la maison la plus rapprochée de la chaumière, après le park, ne leur offrait pas de ressource de société. Dans une de leurs excursions du matin, les jeunes filles avaient découvert, environ à un mille et demi de la chaumière, dans l’étroite et charmante vallée d’Altenham, qui suivait celle de Barton, un ancien et respectable château, qui en leur rappelant celui de Norland, intéressa leur imagination, et piqua leur curiosité. Elles s’informèrent à qui il appartenait ; elles apprirent avec regret que c’était à une dame âgée, d’un très-excellent caractère, nommée madame Smith, mais malheureusement trop infirme pour être en société, qu’elle ne sortait jamais de chez elle, et n’y recevait personne.

      Toute la contrée abondait en promenades délicieuses et variées. La vallée offrait dans les jours de chaleur des ombrages frais, et de presque toutes les fenêtres de la maison, l’on voyait des collines qui invitaient d’aller respirer sur leur sommet un air pur et vivifiant, et d’aller admirer les plus beaux points de vue. Il avait plu pendant deux jours, et les habitantes de la chaumière avaient été retenues chez elle. Dans la matinée du troisième jour, le temps était encore douteux, mais Maria, ennuyée de la retraite, voulut faire une promenade : on apercevait quelques rayons de soleil à travers des nuages pluvieux. Madame Dashwood et Elinor refusèrent de l’accompagner ; l’une préféra ses livres, et l’autre, ses pinceaux, au danger d’être mouillées. Maria persista, assura que le temps serait parfait au haut de la colline, et prenant sous le bras sa petite sœur Emma, toujours en train de courir, elles prirent le chemin de la colline la plus rapprochée. Elles la montèrent avec gaîté, riant de la peur de leur maman et de leur sœur Elinor, se félicitant d’avoir eu plus de courage, admirant comme le ciel devenait bleu, comme l’herbe et le feuillage étaient verts et rafraîchis, comme un air agréable soufflait autour d’elles. Non, disait Maria, il n’y a point au monde de félicité supérieure ! Emma, si lu le veux, nous nous promènerons au moins pendant deux heures.

      De tout mon cœur, dit la petite, et je plains bien Elinor et maman de n’être pas avec nous.

      Ainsi s’encourageant l’une l’autre, elles poursuivirent leur route, quoique le ciel commençât de s’obscurcir, et le vent d’être plus fort, quand soudainement les nuages réunis au-dessus de leur tête fondirent en eau, et qu’une averse de grosse pluie tomba sur elles.

      Surprises et chagrines, elles s’arrêtèrent ; pas un arbre, pas un abri ! Elles étaient alors au-dessus de la colline, et la maison la plus rapprochée était leur chaumière. Nous serons bientôt en bas, dit Emma en prenant sa course ; on descend bien plus vîte qu’on ne monte : viens, Maria, prenons le sentier qui mène directement devant notre porte. Maria s’élance aussi, et dans leur robe blanche, descendant aussi rapidement, elles devaient ressembler, à quelque distance, aux boules de neige qui commencent les avalanches. Maria était sur le point d’atteindre sa sœur, lorsqu’un faux pas sur cette pente rapide et glissante la fait tomber. Emma la voit à terre, entend son cri, mais involontairement entraînée par la vitesse de sa course, il lui est impossible de s’arrêter pour aller à son secours. Elle arrive au bas de la colline en sûreté, et court dans la maison, pour que leur domestique vienne soutenir sa sœur, si par malheur elle ne peut pas marcher seule.

      Un gentilhomme avec un fusil et deux chiens qui le suivaient avait passé sur la colline, et se trouvait à vingt pas de Maria quand son accident lui arriva ; il jeta son fusil, et courut pour lui aider à se relever. Elle-même l’avait essayé, mais son pied s’était trouvé engagé, et elle s’était donné une telle entorse, qu’il lui fût impossible de rester debout. Elle venait de retomber encore, et paraissait souffrir beaucoup, quand le chasseur arriva près d’elle. Il lui offrit ses services ; mais voyant que sa modestie refusait ce que sa situation rendait nécessaire, il l’enleva dans ses bras sans qu’elle pût s’en défendre, et d’un pas sûr et ferme, quoique très prompt, il la porta au bas de la colline. La porte de leur jardin n’était qu’à quelques pas ; Emma l’avait laissée ouverte : il y entra, le traversa rapidement, et suivant


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