Orgueil et Préjugés (Edition bilingue: français-anglais). Джейн ОÑтин
Читать онлайн книгу.– Je voudrais voir dans ces mots un compliment, mais je crains qu’il ne soit pas très flatteur d’être pénétré aussi facilement.
– Pourquoi donc ? Une âme profonde et compliquée n’est pas nécessairement plus estimable que la vôtre.
– Lizzy, s’écria sa mère, rappelez-vous où vous êtes et ne discourez pas avec la liberté qu’on vous laisse prendre à la maison.
– Je ne savais pas, poursuivait Bingley, que vous aimiez vous livrer à l’étude des caractères.
– La campagne, dit Darcy, ne doit pas vous fournir beaucoup de sujets d’étude. La société y est généralement restreinte et ne change guère.
– Oui, mais les gens eux-mêmes changent tellement qu’il y a toujours du nouveau à observer.
– Assurément, intervint Mrs. Bennet froissée de la façon dont Darcy parlait de leur entourage, et je vous assure que sur ce point la province ne le cède en rien à la capitale. Quels sont après tout les grands avantages de Londres, à part les magasins et les lieux publics ? La campagne est beaucoup plus agréable, n’est-ce pas, Mr. Bingley ?
– Quand je suis à la campagne je ne souhaite point la quitter, et quand je me trouve à Londres je suis exactement dans les mêmes dispositions.
– Eh ! c’est que vous avez un heureux caractère. Mais ce gentleman, – et Mrs. Bennet lança un regard dans la direction de Darcy, – semble mépriser la province.
– En vérité, maman, s’écria Elizabeth, vous vous méprenez sur les paroles de Mr. Darcy. Il voulait seulement dire qu’on ne rencontre pas en province une aussi grande variété de gens qu’à Londres et vous devez reconnaître qu’il a raison.
– Certainement, ma chère enfant, personne ne le conteste, mais il ne faut pas dire que nous ne voyons pas grand monde ici. Pour notre part, nous échangeons des invitations à dîner avec vingt-quatre familles.
La sympathie de Mr. Bingley pour Elizabeth l’aida seule à garder son sérieux. Sa sœur, moins délicate, regarda Mr. Darcy avec un sourire significatif. Elizabeth, voulant changer de conversation, demanda à sa mère si Charlotte Lucas était venue à Longbourn depuis son départ.
– Oui, nous l’avons vue hier ainsi que son père. Quel homme charmant que sir William, n’est-ce pas, Mr. Bingley ? distingué, naturel, ayant toujours un mot aimable à dire à chacun. C’est pour moi le type de l’homme bien élevé, au contraire de ces gens tout gonflés de leur importance qui ne daignent même pas ouvrir la bouche.
– Charlotte a-t-elle dîné avec vous ?
– Non. Elle a tenu à retourner chez elle où on l’attendait, je crois, pour la confection des « mince-pies ». Quant à moi, Mr. Bingley, je m’arrange pour avoir des domestiques capables de faire seuls leur besogne, et mes filles ont été élevées autrement. Mais chacun juge à sa manière et les demoiselles Lucas sont fort gentilles. C’est dommage seulement qu’elles ne soient pas plus jolies ; non pas que je trouve Charlotte vraiment laide, mais aussi, c’est une amie tellement intime...
– Elle m’a semblé fort aimable, dit Bingley.
– Oh ! certainement, mais il faut bien reconnaître qu’elle n’est pas jolie. Mrs. Lucas en convient elle-même et nous envie la beauté de Jane. Certes, je n’aime pas faire l’éloge de mes enfants, mais une beauté comme celle de Jane se voit rarement. À peine âgée de quinze ans, elle a rencontré à Londres, chez mon frère Gardiner, un monsieur à qui elle plut tellement que ma belle-sœur s’attendait à ce qu’il la demandât en mariage. Il n’en fit rien toutefois – sans doute la trouvait-il trop jeune, – mais il a écrit sur elle des vers tout à fait jolis.
– Et ainsi, dit Elizabeth avec un peu d’impatience, se termina cette grande passion. Ce n’est pas la seule dont on ait triomphé de cette façon, et je me demande qui, le premier, a eu l’idée de se servir de la poésie pour se guérir de l’amour.
– J’avais toujours été habitué, dit Darcy, à considérer la poésie comme l’aliment de l’amour.
– Oh ! d’un amour vrai, sain et vigoureux, peut-être ! Tout fortifie ce qui est déjà fort. Mais lorsqu’il s’agit d’une pauvre petite inclination, je suis sûre qu’un bon sonnet peut en avoir facilement raison.
Darcy répondit par un simple sourire. Dans la crainte d’un nouveau discours intempestif de sa mère, Elizabeth aurait voulu continuer ; mais avant qu’elle eût pu trouver un autre sujet de conversation, Mrs. Bennet avait recommencé la litanie de ses remerciements pour l’hospitalité offerte à ses deux filles. Mr. Bingley répondit avec naturel et courtoisie, sa sœur avec politesse, sinon avec autant de bonne grâce, et, satisfaite, Mrs. Bennet ne tarda pas à redemander sa voiture.
À ce signal, Lydia s’avança : elle avait chuchoté avec Kitty tout le temps de la visite et toutes deux avaient décidé de rappeler à Mr. Bingley la promesse qu’il avait faite à son arrivée de donner un bal à Netherfield. Lydia était une belle fille fraîche, joyeuse, et pleine d’entrain ; bien qu’elle n’eût que quinze ans, sa mère dont elle était la préférée la conduisait déjà dans le monde. Les assiduités des officiers de la milice qu’attiraient les bons dîners de son oncle, et qu’encourageaient sa liberté d’allures, avaient transformé son assurance naturelle en un véritable aplomb. Il n’y avait donc rien d’étonnant à ce qu’elle rappelât à Mr. Bingley sa promesse, en ajoutant que ce serait « vraiment honteux » s’il ne la tenait pas.
La réponse de Mr. Bingley à cette brusque mise en demeure dut charmer les oreilles de Mrs. Bennet.
– Je vous assure que je suis tout prêt à tenir mes engagements, et, dès que votre sœur sera remise, vous fixerez vous-même le jour. Vous n’auriez pas le cœur, je pense, de danser pendant qu’elle est malade.
Lydia se déclara satisfaite. En effet, ce serait mieux d’attendre la guérison de Jane ; et puis, à ce moment sans doute, le capitaine Carter serait revenu à Meryton.
– Et quand vous aurez donné votre bal, ajouta-t-elle, j’insisterai auprès du colonel Forster pour que les officiers en donnent un également.
Mrs. Bennet et ses filles prirent alors congé. Elizabeth remonta immédiatement auprès de Jane, laissant à ces dames et à Mr. Darcy la liberté de critiquer à leur aise son attitude et celle de sa famille.
English
X
La journée s’écoula, assez semblable à la précédente. Mrs. Hurst et miss Bingley passèrent quelques heures de l’après-midi avec la malade qui continuait, bien que lentement, à se remettre et, dans la soirée, Elizabeth descendit rejoindre ses hôtes au salon.
La table de jeu, cette fois, n’était pas dressée. Mr. Darcy écrivait une lettre et miss Bingley, assise auprès de lui, l’interrompait à chaque instant pour le charger de messages pour sa sœur. Mr. Hurst et Mr. Bingley faisaient une partie de piquet que suivait Mrs. Hurst.
Elizabeth prit un ouvrage mais fut bientôt distraite par les propos échangés entre Darcy et sa voisine. Les compliments que lui adressait constamment celle-ci sur l’élégance et la régularité de son écriture ou sur la longueur de sa lettre, et la parfaite indifférence avec laquelle ces louanges étaient accueillies formaient une amusante opposition, tout en confirmant l’opinion qu’Elizabeth se faisait de l’un et de l’autre.
– Comme miss Darcy sera contente de recevoir une si longue lettre !
Point de réponse.
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