Programme des Épouses Interstellaires Coffret. Grace Goodwin
Читать онлайн книгу.descends les escaliers, mon fils lové contre moi.
10
Roark, Avant-poste Neuf, Continent Nord
Après douze heures passées dans le caisson ReGen, je suis, d’après les scanners, remis à quatre-vingt-douze pour cent. J’ai des ecchymoses, des blessures encore rouges à peine cicatrisées. Je ne suis pas remis à cent pour cent comme si j’étais resté dans le caisson le temps nécessaire. Mais j’ai pas le temps de me remettre à cent pour cent. Je dois savoir ce qui est arrivé à Natalie. Si elle est morte, je dois en avoir le cœur net. Je ne trouverai pas le repos tant que je ne connaîtrais pas la vérité. Comment puis-je trouver le repos si je la sais en train d’errer quelque part, blessée, seule sur Trion. Elle peut être aux mains des Drovers, torturée. Violentée. Blessée.
Je dois la trouver. Si je tombe sur un cadavre, j’attendrai que les tests ADN confirment qu’il s’agit bien de ma femme.
Je lui ai donné ma parole, je lui ai promis de venir la chercher, de la protéger, je tiendrai promesse jusqu’à mon dernier souffle.
« Laisse tomber. Abandonne, » lance ma mère en entrant sous ma tente. Assis à mon bureau, j’examine les rapports de recherche et les comptes rendus de l’attaque de l’Avant-poste Deux. L’Avant-poste Neuf est plus grand que le petit Avant-poste Deux situé en plein désert, où gît le corps de ma compagne. Ici, aucun risque d’attaque. Les tentes qui entourent l’Avant-poste Neuf sont une vraie ville en plein désert. C’est ici que la femme du Haut Conseiller Tark est arrivée.
Je n’aurais jamais imaginé que Natalie court un tel danger en se téléportant sur un avant-poste plus petit et moins sécurisé. Ça fait des années qu’on n’avait pas eu d’attaques de Drovers. J’aurais dû connaître les dangers encourus et leurs conséquences. C’est ma femme, sa sécurité aurait dû passer en premier. Pas selon mes convenances.
Je n’aurais jamais dû lui faire courir ce risque. J’aurais dû attendre mon retour sur Xalia, un millier d’hommes aurait veillé sur elle nuit et jour, au palais. J’étais impatient et pressé. J’ai tout perdu par manque d’autodiscipline.
Ma mère est plantée là, le visage tiré, avec une liste de candidates potentielles, elle insiste pour que j’en choisisse une originaire de la capitale. Ma mère me croit prêt à passer à autre chose. Que j’aurais oublié la seule femme que j’aimais de tout mon cœur en une dizaine de jours.
Je ne me retourne pas, craignant qu’elle voie ma colère. C’est ma mère, je dois la respecter. Mais je ne suis plus un gamin qu’elle peut mener à sa guise. Je suis un Conseiller. Personne ne me forcera à faire quoi que ce soit. Ma mère refuse d’écouter, je lui sors la seule excuse qui la fera changer d’avis. « Tu aurais tiré un trait sur Père aussi facilement ? L’homme de ta vie ?
— C’est différent, mon fils.
— Non. C’est pareil. Tu es sa femme, Mère. Unis via le même système que Natalie et moi. C’était ma femme. La femme idéale. Je me suis uni à elle. La première nuit.
— C’était une histoire d’un soir, Roark. Si tu avais passé une nuit avec—
— Non. Abandonner Natalie ? Jamais. Rien ne prouve qu’elle soit morte.
— Ils ont retrouvé sa robe.
— Ça ne prouve rien. Je ne vais pas abandonner aussi facilement. Je me lève et me plante devant elle. Je lui ai donné mon cœur, Mère. Laisse-moi le temps de guérir. »
Ma mère garde longuement le silence, je finis par penser qu’elle ne me répondra pas. « Non. Je n’aurais pas pu oublier ton père. Excuse-moi. Je n’avais pas réalisé à quel point tu l’aimais. Je ne l’ai vue que brièvement et elle dormait. Nier son existence serait bien trop facile, je vois à quel point tu y étais attaché.
— J’avoue avoir été sceptique mais c’était la femme … idéale. Je veux— »
Mon père fait irruption sous la tente, les yeux écarquillés, son visage … possède une expression indéfinissable.
« Le Commandant Loris est là. Ton médaillon a tinté. Il est activé. » Il a le souffle court, comme s’il avait couru. Mais je sais qu’il n’en est rien, il est tout excité.
Je me fige, une énergie nouvelle pulse dans mes veines, je ne m’étais pas rendu compte à quel point j’étais plombé par la frustration, l’attente et le désespoir. « Quoi ? »
Je traverse la pièce et rejoins mon père, mille questions m’assaillent. L’espoir.
Il indique l’extérieur de la tente. « Viens fiston. Il est au poste de commandement.
— Ça a tinté ? Je croyais que tu portais le médaillon autour du cou ? » demande ma mère.
J’aurais dû les laisser passer devant par politesse mais je ne peux pas attendre. Je pousse presque mon père hors de mon passage et me rue hors de la tente. Le sable roule sous mes pieds, les deux soleils me font cligner des yeux. Le commandant est au milieu du poste de commandement, dans la tente que j’ai identifiée comme telle l’autre jour.
« Vous avez du nouveau. » Ce n’est pas une question.
Le Commandant Loris hoche brièvement la tête. « Le poste de commandement central de Xalia a envoyé un message urgent. Votre médaillon est activé. Je suis venu sur le champ assurer votre sécurité. En vous voyant, je les informerai que vous êtes visiblement vivant et en bonne santé. »
Mon cœur s’accélère, mes doigts se referment sur du vide. Rien. « Le médaillon n’est plus en ma possession. Je l’ai offert à Natalie.
— A Natalie ? Votre femme ? Vous le lui avez remis ? Le commandant reste bouche bée. Pourquoi avoir fait un truc pareil ? Vous connaissez la valeur que revêt ce médaillon sur cette planète ? »
Je sais pertinemment qu’il n’est pas en train de me manquer de respect mais je m’adresse à lui d’un ton sec. « Oui je sais, merci. Vous avez une idée de la valeur que Natalie revêt à mes yeux ? Il s’agit de la femme d’un Conseiller, commandant. Surveillez votre langage quand vous vous adressez à moi. »
Il pivote sur ses talons et s’éloigne à distance respectueuse, regarde d’un air concentré derrière mon épaule. « Je vous présente mes excuses, Conseiller.
— Acceptées, Commandant. » Je le dépasse et avance vers le poste de commandement de l’Avant-poste Neuf.
Trois gardes se trouvent dans la grande tente. Ils se lèvent et me saluent. Au vu de leurs uniformes, le commandant est le plus haut gradé.
Si le médaillon a tinté, ça veut dire—
« Elle est vivante, » dis-je in petto, j’ai hâte de sortir de la tente pour la retrouver, où qu’elle soit. Tout le monde m’observe faire les cent pas dans la tente.
« Seul votre ADN peut activer le médaillon, Conseiller, pas le sien. Le commandant marque une pause.
— Elle a le médaillon.
— Ça ne prouve pas qu’elle soit en vie, réplique le commandant. Ça prouve seulement qu’un membre de votre famille détient le médaillon. »
Mon père avance. « Toi, moi, ta sœur ou ses enfants, sommes les seuls membres de la famille capables de déverrouiller le médaillon. » Je ne l’ai pas vu entrer sous la tente mais il dit vrai. « Ta sœur est avec son mari et le Haut Conseiller Tark. Il n’y a aucune chance que Natalie ait atterri chez eux. Tark nous l’aurait dit.
— Comment aurait-elle pu atterrir chez eux ? Savoir qui est Sari ? » ajoute ma mère, elle parle de Sari, ma sœur. C’est vrai. Je n’ai jamais